viper green

« Cependant je m’éloignais, emportant pour toujours, comme premiers type d’un bonheur inaccessible aux enfants de mon espèce par des lois naturelles impossible à transgresser, l’image d’une petite fille rousse, à la peau semée de taches de roses, qui tenait une bêche et qui riait en laissant filer sur moi de longs regards sournois et inexpressifs. »

Marcel Proust, à la recherche du temps perdu, du côté de chez Swann, 1913.


Le vert, n’est pas populaire comme la vanille. (J’allais dire vulgaire, ça marche aussi, mais ce n’est pas le propos. Mais je ne peux pas dire ça parce que je vais devoir passer des heures à expliquer que trouver votre parfum vulgaire ce n’est pas vous trouver vulgaire et que j’aime bien la vulgarité, ça a un côté fun que j’apprécie. Et de toute façon je suis snob mais c’est mon blog et j’ai le droit.) Il y a eu un espèce d’âge d’or du vert en plein flower power quand les dames snobaient les odeurs alourdies de patchouli des hippies et se réfugiaient dans l’élégance hautaine du vert. Enfin, je parle d’âge d’or mais ce n’étaient pas le gros succès non plus… Pour 100 ml de vert, il se vendait des litres d’eau chyprée.



Issey Miyake à tenté un bel essais en 2009 avec A Scent. Froid et raide, le parfum n’a pas été un succès. Il était très joli mais n’a pas séduit. Le vert, c’est désormais et peut-être à tout jamais un domaine de niche. Enfin, si la niche consent à nous faire autre chose que des ouds et des vanilles à la pelle. En tous cas, de tempe en temps, certain osent encore. Ex Nihilo par exemple a commis un Viper Green en 2018.



Le titre est un peu mensonger. On trouve le vert, du début à la fin du parfum, le serpent… Un peu moins. Disons qu’il y a des traces de perversité dans le parfum. Le décors est le même pour les trois actes du parfums : c’est un jardin. Un jardin au printemps. Drôle d’idée d’en parler en automne ? C’est mon amour du printemps qui s’exprime. Les premières notes installe le vert, c’est celui d’un gazon humide. Un gazon à l’anglaise, vert vif, dans un hypocrite jardin à l’anglaise qui se fait passer pour « naturel » alors que tout est calculé, que chaque brin d’herbe est parfaitement à sa place.



L’ambiance reste gazon et feuillage mais se fleurit un peu. Fleurs blanches, propres et nettes dont la chaleur ne prend pas le dessus sur la verdeur du feuillage. Il semble que peu à peu, le jardin passe à l’ombre grâce au vétiver et au patchouli qui apportent des nuances de racines et de terre au vert. Ce n’est pas complètement naturaliste. On sent bien le « parfum » et une ambiance savonneuse et poudrée.



Ex Nihilo vise un public qui aime sentir le propre, le cheveux bien lavé, un public qui a aimé Chloé et Daisy, et lui propose quelque chose de plus sophistiqué, plus élaboré et poétique. Si Viper Green est très « jeune fille en fleurs » il ne l’est en n’oubliant pas la dose de perversité nécessaire pour rendre le personnage intéressant. 


Certes, ce n’est pas le parfum de la serpentine Mélusine, mais si on regrette les robes couleur d’émeraude de la fée, on pourra se consoler avec cette part d’obscurité qui s’esquisse dans « un sourire dissimulé. » Je l’aurais voulu plus radical, mais, alors que j’ai des goût finalement très mainstream (Certes, un mainstream très 1950.) lorsqu’il est question de vert, je n’aime que l’invendable et l’antipathique. Si le sourire de Gilberte est méprisant, il reste un sourire, et c’est probablement préférable aux claques vertes ostensiblement méprisantes…



Viper Green, Nadège Le Garlantezec pour Ex Nihilo, 2018.


Flacon reçu.


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