désenchantement au jardin noir

Restant dans le vert, j’ai essayé dernièrement Ombre de Hyacinth de Tom Ford. La jacinthe est une fleur dont j’apprécie l’odeur mais qui peut facilement être gênante : trop sucrée, lourde et capiteuse, ou trop verte, cinglante et crissante. La version qui m’a le plus séduit est celle de Penhaligon’s : équilibrée, balancée par des notes terreuses. La jacinthe de Serge Lutens, celle de Bas de Soie, était aussi très belle mais à condition d’aimer se prendre un gifle…

Ombre de Hyacinth essaye d’éviter l’aspect sucrés et cinglants et présente une jacinthe verte, assez jolie, adoucie, qui penche vers un aspect poudré cosmétique et fini par évoquer une savonnette de grand hôtel. C’est plaisant, intéressant mais l’aspect soliflore vire à l’ennui, d’autant que le parfum semble s’écrouler. Le savonneux est de plus ne plus présent, l’aspect nature, se fait très  vite oublier : un comble pour une collection appelée Jardin Noir.

 Et il faut bien dire qu’on se pose des questions quant au positionnement : Tom Ford veut faire du luxe, très bien, mais un soliflore un peu pâlichon à ce prix, le seul luxe que je puisse y voir, c’est justement le prix. Et une vague originalité, certes, mais avoir l’impression de s’être lavé avec un savon à la jacinthe ne justifie peut-être pas une telle dépense. Franchement, pendant des années, on nous a vendu « de belles matières » ou des accords « trop difficiles pour le grand public » mais de plus en plus, la niche n’est qu’une histoire de prix et de diffusion restreinte soigneusement entretenue. . D’ailleurs, ce parfum possède le défaut de bien des mainstream : un joli départ et un fond sans intérêt quoique joli. Mais les niches comme le mainstream sont tenues maintenant de sortir beaucoup. Et les collections par thème, ça fait toujours bien, n’est-ce pas ?

Quand comprendra-t-on qu’on ne veut pas plus de choix mais des choses jolies ? En attendant, désenchantement.

Tom Ford, Ombre de Hyacinth, 2012