sinecure

 


L’année a pour moi commencé en Normandie pour me refaire une santé, ayant passé la fin de 2022 à agoniser plutôt qu’à faire la fête. J’ai surtout profité de la lumière qui même par temps gris en fin de journée est plus belle qu’à Bruxelles où la nuit éternelle semble parfois s’être installée. J’aime bien le gris, c’est chic, assez flatteur mais quand même… (à Bruxelles, le gris est fort peu photogénique.) 

Bien sûr, je suis la personne au monde la moins susceptible de jouir des beautés (lesquelles ?) da la nature même lorsque les allergies me laissent un peu de répit. Mettez-moi sur une plage et dans les cinq minutes, je ne suis pas détendu en contemplant la mer mais en panique parce que j’ai vu passer une mouette et qu’elle pense à m’attaquer et veut m’arracher les yeux ; je SAIS, j’ai vu les oiseaux de Hitchcock, on ne me la fait pas à moi. Cependant pour manger de la crème d’Isigny et du fromage, vous pouvez me faire confiance. (Oui, mon exil n’était pas qu’esthétique, il était aussi gastronomique.) 

Je me suis adonné à ma passion pour les églises. Je suis incapable de passer devant une église (sur les photos, Notre Dame des Victoires à Trouville) sans y rentrer. Ce sont des lieux si calmes, si reposants, loin de l’agitation. On peut y entrer, s’assoir, et penser ou ne pas penser et laisser vagabonder son esprit en regardant les jeux de lumière, les tableaux et les statues toujours un peu saint-sulpiciens que j’aime beaucoup. (Au premier degré, c’est mon côté amoureux des livres pour enfants qui parle et probablement un atavisme catholique qui se manifeste.)  Dans une église on a la paix, on semble recueilli, méditatif alors qu’on est juste en train de se demander si on prendra plutôt un mille-feuille ou un Paris-Brest à la boulangerie. Franchement, pour avoir la paix et fuir le monde, penser à des choses importantes, ce sont des lieux très sous-estimés. (Pendant ce temps, dans la cathédrale de Rouen, Mme Bovary et Léon…)

Et puis il y a l’odeur. Rien n’est plus beau, plus émouvant, que l’odeur de l’encens qui traîne et s’accroche aux pierres humides et aux vieilles boiseries. Voilà qui transporte, élève l’âme et fait rêver. Après ça, ne vous étonnez pas que j’aime tant le relique d’amour d’Oriza Legrand, ni que j’ai une passion pour les parfums qui sentent l’encens en général. C’est totalement apaisant. Bien sûr, j’ai une nette préférence pour le style gothique. J’ai un peu de mal avec le néo-classique et ne comprends absolument pas le roman. (Déjà, c’est sombre le roman ! Tous avec Goethe : Mehr Licht ! Mehr Licht ! Oui, vous me direz que je suis aussi un obsédé du SPF 50 et alors ? Je revendique clairement mon droit à la non-cohérence.)

Pour parlez de parfum, je ne m’étais plus parfumé alors que j’agonisais l’an passé par manque d’envie. Faire ma routine réduite à son minimum était le maximum que je pouvais faire pour conserver un peu de dignité et apparence humaine et je me parfume uniquement par plaisir, je désapprouve fermement les gens qui se parfume « parce que ça finit une tenue, que c’est élégant et propre. » (Ces gens expliquent la réussite des plus viles astuces marketing ; je suis certain qu’une place spéciale leur est réservées en enfer, probablement celle qui jouxte la cellule des porteurs de bois qui pique et celles des assassins de chatons.) Mais le goût des parfums m’était revenu peu à peu et j’avais porté en premier Lavallière d’Yves Saint Laurent qui m’avait beaucoup plu ; c’est donc celui que j’avais choisi d’empoter. (Un seul parfum en vacances, ça évite de se poser des questions, c’est beaucoup plus reposant.)

C’était absolument parfait. Je le redis pour ceux qui n’ont pas lu le billet consacré : c’est le bon équilibre entre l’air du temps et quelque chose de classique, une certaine originalité sans excentricité qui sait rester élégante selon les critères d’une maison qui fait du luxe et plus de la mode. Il y a une jolie figue verte, assez brève, ce qui m’arrange parce que j’adore la note de figue mais elle m’emmerde assez vite, qui lance une jolie rose fraîche, transparente, propre (merci les muscs blancs) et charmante, ravissante, suffisamment changeante que pour ne pas lasser. (Pas juste une rose, mais l’impression qui domine est celle d’un bouquet de rose si vous y chercher autre chose, vous serez déçus.)  J’ai vraiment adoré le porter et plus encore, rentrer en fin de journée dans l’appartement que j’avais quitté le matin et sentir les effluves de Lavallière qui m’attendait. (Les muscs blancs, c’est assez formidable quand c’est bien utilisé, ça permet de faire durer le plaisir de la légèreté. Annick Ménardo s’est très bien débrouillée avec eux !


Ce temps que je n’ai pas utilisé à choisir mon parfum du jour, je l’ai gaspillé de la meilleure des façons en lisant. Pour commencer, le royaume désuni de Jonathan Coe. Comme toujours il m’a fallu trois chapitres pour entrer dans le roman. C’est toujours pareil, je me dis que je vais moins aimer et puis finalement j’adore. Certes, je trouve qu’il commence à faire un peu trop le coup du « racontons l’histoire de l’Angleterre à trac-vers l’histoire d’une famille » mais il le fait tellement bien, de façon si juste que je finis toujours par en redemander et attendre le suivant et tant pis si c’est encore ça. Là, à la fin (Le roman va de la libération à l’épidémie de covid), il m’a vraiment ému. (Jonathan Coe m’amuse mais sais aussi très bien m’émouvoir.)

Dans un autre genre, j’ai lu Rome en un jour de Marie Pourchet qui m’a beaucoup fait rire en décortiquant à coup de petite phrases assassines mais terriblement juste un couple et ses amis. Je me suis régalé telle une hyène flairant l’animal blessé au loin qui ricane en attendant le dénouement. Mon conseil : lisez-le, surtout si vous êtes célibataires, mais surtout lisez-le loin du monde.


Autre lecture : tant que le café est encore chaud de Toshikazu Kawaguchi. C’était la lecture feel good des vacances. Une histoire un peu fantastique en un lieu unique (c’est l’adaptation d’une pièce de théâtre) avec portée morale et réflexion philosophique légère. Le feel good, ce n’est pas forcément ma tasse de thé (crédibilité nulle de la part de quelqu’un qui regarde la Boum à chaque rediffusion), la morale facile encore moins et je ne peux dire que le roman m’a laissé une grande impression, mais j’y ai pris du plaisir et si il fait partie des livres qui ne me marquent pas et que j’oublierai facilement (terminé il y a trois jours, je ne me souviens déjà plus du moindre détail), je dois dire que je me réjouis de lire la suite. (Donc, oui, je recommande.)

En skincare, j’avais une routine complète de vacances, toutes en échantillons, je vous ferai un billet rien que sur le sujet parce que… Je suis déjà un peu bavard et que le sujet constitue un bon exemple de routine bien fichue et efficace et que ça permettra de reparler de produits connu et aimé. (Oui, je tease.) 


Commentaires

  1. Belle région, pas de petites tartes aux pommes ? Magnifiques sujets de photos. Les églises me rendaient le cœur malade, surtout les tableaux épouvantablement effrayants pour moi ! Je préfère les petites chapelles, bien que je n'y ai pas mis les pieds depuis des lustres. Leur dépouillement et leur simplicité me sont plus légères. L'important c'est d'avoir retrouvé une meilleure santé pour poursuivre cette nouvelle année ! Gabrielle Dlr

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