"Et il se mit à rire à gorge déployée comme si nous avions été seul dans un salon."
Marcel Proust, à la recherche du temps perdu, le temps retrouvé, 1927.
En 1971, Saint Laurent qui régnait sur la mode commettait sa pire collection en termes de presse. La collection Libération était pourtant magnifique, simplement trop en avance sur son temps. Et surtout trop chargée de références qui ne pouvaient plaire à toute la France. Mais Monsieur Saint Laurent pouvait se permettre de s’en foutre, Il avait tant apporté, tant été célébré, déjà, qu’il pouvait se permettre d’avoir raison avant tout le monde. La jeunesse était de son côté face aux douairières en Chanel à sautoirs de perles. Parmi ses création avant le scandale Libération, On rappellera qu’il avait mis les femmes en pantalons et qu’il les avait envoyées dans ses boutiques de prêt-à-porter. Ses boutiques Rive Gauche.
Si Y (évoqué ICI) était un parfum épure impeccable, taillé de main de maître pour tomber parfaitement, Rive Gauche allait être plus exubérant. C’était un floral aldéhydé, lointain descendant du N°5 de Chanel, directement influencé par le Calandre de Paco Rabanne. Point de nimbe doré, de richesse marquée comme rue Cambon. Les aldéhydes métalliques lancent une rose fraîche dans une atmosphère savonneuse et poudrée, très irisée, définitivement débarrassée du fond lourd et gras des parfums de jadis. Le parfum est moderne, aéré et très présent. Ébouriffant, un peu ébouriffé malgré la laque de son brushing et un peu indiscret. Ce n’est pas sa faute, si on le remarque, c’est qu’il est remarquable ! Rive Gauche, c’est le grand classique aldéhydé qui oublie de se prendre au sérieux et ça fait du bien.
En dépit de son côté un peu tapageur, de son chic « j’ai plus d’allure que d’argent, » il est très facile à porter. Encore aujourd’hui. Ses notes très propres passent toujours formidablement bien. Il a un peu bougé, il est passé au muscs blancs mais cela sied plutôt à sa formule. C’était le parfum du prêt-à-porter et c’est peut-être celui qui fait qu’il est moins vieilli parmi les dames de la couture. Y est trop parfait et trop précieux, Paris trop midinette provinciale, mais Rive Gauche passe encore parfaitement. Il fait classique, pas jeune, mais pas vieux non plus. Il faut faire une mention spéciale pour l’extraordinaire flacon : une bombe de métal rayé, très légère, faite pour bouger, être mise dans le fond d’un sac, pas pour être exhibée sur une coiffeuse. Ce qui va très bien à ce parfum versatile qui se sent à l’aise partout. Même s’il n’adore pas forcément être confiné, mais ceci est une autre histoire.
Rive Gauche, Michel Hy et Jacques Polge pour Yves Saint Laurent, 1971.
Comme un bouquet de fleurs lancé au visage : voila comment j'ai ressenti ce merveilleux parfum, dont j'ai toujours un flacon d'origine au fond de mon placard. Je ne sais pas ce que donne la nouvelle formulation, et peut-être que je n'ai pas trop envie de le savoir... ;)
RépondreSupprimerCe "bleu" Saint Laurent, la montre et le stylo assorti, il me les fallait bien sur ! Surtout que leur prix étaient vraiment abordables, tout comme ses bijoux fantaisie !
Merci pour cet article qui me rappelle de bons souvenirs, et bon w-e !
signé : Gabrielle Dlr.
Non, mais perso, je suis YSL forever (et pourtant tout-à-fait objectif) et tellement en amour avec ce parfum et ce packaging tellement génial! Rive Gauche est très dans la face, mais comme c'est des fleurs, ça va! Il est trop mais c'est merveilleux, pas du tout vulgaire ou incommodant, c'est vraiment une TRÈS belle réussite ce parfum
SupprimerMon père, aveugle, vaporisait Rive Gauche, parfum de ma mère, après sa disparition, pour retrouver l’essence de sa présence. B. l S.
RépondreSupprimerOh, c'est tellement touchant, cette anecdote!
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