fashionopolis

 lundi lecture


Ce n’est pas le premier livre de Dana Thomas que je lis : j’avais bien aimé « comment les marques tuent le luxe ? » même si c’était globalement moins intéressant parce que tout le monde n’a pas envie de pleurer sur Louis Vuitton. Fashionopolis parle de la mode, de la fast fashion et des vêtement en général et ça nous concerne absolument tous. Le livre est à la fois absolument déprimant et encourageant. Soyons clairs dès le début, nous savons déjà, nous nous en doutons même si parfois nous nous voilons la face, la mode est l’une des pire industries qui soient et ce à tous points de vue. Elle exploite les travailleurs au maximum. Humainement la mode est une catastrophe. Il faut vraiment être de mauvaise foi pour s’imaginer qu’on peut acheter en magasin une tenue complète pour une trentaine d’euros et penser que les gens qui ont travaillé pour que cette tenue existe ont été payé décemment dans des conditions de sécurité minimales. Et d’un point de vue développement durable… Comment dire ? Par définition, la mode, ce qui se démode, est l’industrie du gaspillage absolu qui produit toujours plus et génère toujours plus de déchets. C’est affolant à lire. Même si on sait déjà.



On sait déjà tout ça, parce que nous ne sommes pas complètement naïfs, parce qu’il y a régulièrement des livres, des articles, des reportages sur le sujet. Mais c’est toujours bon d’avoir une mise à jour et c’est toujours bon de garder ça en tête, d’autant que le livre va plus loin que le premier reportage venu sur une quelconque usine honteuse dans un pays en voie de développement ou l’atelier clandestin à deux pas de chez nous. Avoir lu No logo de Naomi Klein il y a 20 ans, ça ne suffit pas, ça ne suffit plus. Surtout si ça n’a pas vraiment changé les comportements. Soyons honnêtes, en surface, rien ne semble avoir changé, il y a vraiment peu de raisons de penser que les choses vont dans le bon sens en dehors de certains comportements individuels qui comptent assez peu.  Et c’est ce que j’ai aimé dans le livre de Dana Thomas, c’est qu’il n’est pas désespérant ni désespéré.



L’auteure explore aussi les solutions qui apparaissent et les solutions qui apparaissent à l’intérieur même de l’industrie. On va voir ce qui se passe sur le côté : les gens qui décident de produire bio, de relocaliser, d’être plus durable. On va voir aussi chez les grands méchants (ceux qu’on nous montre souvent comme ça) de l’industrie ce qui se fait et qui peut/pourra faire une différence. Par exemple, la chimie qui empoisonne les sols et les gens pour des générations avec des colorants de synthèse immondes peut aussi fournir des façons de recycler en réduisant au maximum l’empreinte écologique : moins de déchets, moins d’énergie consommée, moins d’eau utilisée, etc. Il n’y a pas d’angélisme, mais même le greenwashing (ou pas, c’est toujours difficile de juger) de marque comme H&M ou Zara est vu comme quelque chose de positif parce que c’est le signe que notre opinion compte, que notre façon d’acheter pèse et peut faire la différence.



Nous n’avons pas tous les moyens de nous habiller en Stella McCartney, pas tous le courage de ne porter que d’infâmes tenues bio et fair trade moches et déprimantes, pas tous tous les jours non plus l’envie de n’acheter que de la seconde main. Et c’est hyper encourageant de lire quelque chose qui montre qu’il y peut-être des solutions et que ce n’est pas le David, citoyen engagé, seul contre le Goliath de l’industrie mais qu’on peut y arriver ensemble. Autre point positif : ce n’est pas moralisateur ou condescendant, ce n’est pas jugeant. L’auteure le dit elle-même, c’est difficile. Difficile d’être conscient, de le rester, de lutter et de ne pas céder. Ce qui ne veut pas pour autant dire baisser les bras, se résigner ou se mettre la tête dans le sable. Ce n’est pas parce qu’en tant que consommateurs finaux nous ne sommes pas nécessairement coupables de tous les maux que nous ne devons pas être responsables et réfléchir notre consommation.


Est-ce que ça change ma façon de consommer ? Oui et non. Je pense que j’ai lu le livre parce que j’étais déjà conscient de certaines choses et parce que je tentais déjà d’apporter certains changements à ma consommation, mais le livre m’ouvre des perspectives et m’encourage, oui. (Mais soyons clairs, même si j’essaye d’éviter la fast fashion, etc., je suis loin d’être un consommateur modèle.)


Est-ce que c’est le genre de sujet qui vous intéresse ? Vous interpelle ? Vous préoccupe ? Est-ce que vous songer à mettre des solutions en place ? Est-ce que vous avez des solutions déjà mise en place ? Lesquelles ? 


Fashionopolis, le vrai prix de la mode et ce qui peut la sauver, Dana Thomas, 2020.


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Commentaires

  1. Je note, parce que le sujet m'intéresse à plusieurs titres :
    - notre impact sur la planète, le bien-être des autres, via notre mode de consommation (le coût réel de cette robe Zara (même pas forcément bien coupée), les coûts assumés par cette marque qui semble chère mais produit dans des ateliers dans lesquels les gens sourient et travaillent en famille, par exemple) ;
    - le fait que je me sois mise à faire une partie de ma garde-robe a approfondi la réflexion : j'essaie d'acheter autant que possible des matières premières produites de manière artisanale et/ou éthique, pour ne pas retomber dans les comportements que j'essaie d'éviter en achetant moins de vêtements.

    On ne peut pas avoir un comportement 100% responsable et non polluant (sauf à vivre dans la forêt en mangeant des baies, mais personnellement j'aime bien le chauffage et l'eau courante), mais une responsabilisation collective peut faire évoluer les choses (à petits pas de préférence, en général c'est ce qui amorce de vrais changements, plutôt que des comportements chocs qui ne tiennent pas plus de 3 mois car non réfléchis et aux conséquences qui n'ont pas été anticipées).

    Bref, le sujet m'intéresse (je le re précise, au cas où ça ne se serait pas vu), et je vais me procurer ce livre.

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    1. Ah bien sûr qu'on ne peut pas faire du 100% responsable. Pour certain, c'est même économiquement impossible. (Loin de nous l'idée de faire la leçon à la mère de famille nombreuse qui habille ses enfants chez Primark!)

      Le fait de coudre soi-même change énormément de choses à notre consommation, je trouve. On est bien plus attentif à la qualité, on la repère nettement plus facilement, plus question de se faire avoir avec des tissus qui ne serait pas utilisés dans le droit fil et dont on sait d'avance qu'il ne vont pas bien se tenir (et être TRES pénible à repasser aussi) par exemple. Et en plus on réduit notre impact en réparant au lieu de jeter ce vêtement même pas cher qui ne vaut pas la peine d'être porter chez notre couturière, et rien que ça, c'est énorme. Le simple fait de choisir un vitement qui va bien tomber, être solide et être réparé, ça change déjà beaucoup.

      Le simple fait de parler de vêtements et non de mode (par définition destinée à ne pas durer) suffit parfois à changer notre façon de consommer, je trouve.

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  2. Bravo pour cet article, rien à rajouter, je suis de plus en plus effarée par le monstrueux gaspillage que notre société produit tous les jours !
    Il serait grand temps d'être raisonnable, sans pour cela être triste ou sans goût. Il serait grand temps de remettre l'humain à sa juste place, avant l'autodestruction programmée. Signée Gabrielle Dlr

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    1. J'ai presqu'envie de dire qu'en plus on produit trop et surtout de la laideur, mais c'est probablement parce que j'ai le fond mauvais. Ou pas. Qui à vraiment besoin d'une collection Primark Disney? Certainement pas notre sens de l'esthétique. Mais je suis certain que nous pouvons nous en sortir en apportant chacun notre pierre à l'édifice...

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    2. Non, pas de fond mauvais en disant qu'on produit trop, juste lucidité ! C'est aussi mon avis, le goût ça s'éduque, hélas, il semblerait que l'éducation a été bien mise à mal depuis des années, sous prétexte de liberté, on sacrifie à la facilité, à l'achat immédiat, qu'on va vite jeter pour acheter autre chose. La majorité des gens préfère beaucoup et moche à peu et bien. Ainsi sont les humains. Courage. Gabrielle Dlr.

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  3. C'est bien un sujet essentiel. Je ne suis pas parfaite non plus en la matière (j'ai longtemps été très consommatrice...) mais je compense aujourd'hui en achetant pas mal de seconde main, ce qui me permet de me faire vraiment plaisir et d'investir dans de belles pièces lorsque j'en ai envie, de préférence des classiques car c'est ce que j'aime. Merci pour ton article.

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    1. Ah mais personne n'est parfait, ce serait insupportable. Déjà les gens qui se croient parfait, c'est totalement pénible... On a tous fait des erreurs et on en fait encore, faut voir global aussi: on ne doit pas atteindre un état ou on aurait tout tout bon tout le temps mais voir ce qu'on fait au total et essayer d'être en positif. Basiquement, on a QUAND MÊME besoin de consommer, de s'habiller... Non, courir tout nu, ça ne va pas être possible: déjà, ce sera pas toujours joli, puis on aura froid et on risque d'être tout le temps malade et en plus on devra consommer beaucoup plus de crème solaire et ça pollue aussi...

      (Je REposte ce commentaire parce que la première fois, il a été mangé.)

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