tests

"J’essayais de trouver la beauté là ou je ne me fus jamais figuré qu’elle fût…"

Marcel Proust, à la recherche du temps perdu, le côté de Guermantes, 1920.

En ce moment, c’est la saison des testages et des votes pour l’Olfactorama. (Une occasion de se pencher sur une année écoulée, au calme, de comparer en s’épargnant le pire puisqu’il y a une pré-sélection, de découvrir et d’aimer certaines choses aussi.) Je vous épargne mon avis sur le sujet, ce ne serait pas fairplay vis-à-vis des autres testeurs que je risquerais d’influencer ou d’énerver et je trouve que c’est un minimum de laisser les gens essayer tranquillement chez eux ces anonymes sélectionnés et envoyés avec soin par les organisateurs. Non, j’ai plutôt envie de parler de tests en général et de comment je teste.

Le pire testage de l’histoire de la parfumerie, c’est hélas celui que nous sommes tous contraint de pratiquer :  après une journée de bureau passée à suffoquer dans les effluves de La Vie Est Belle de notre collègue, dans une parfumerie saturée d’odeurs, alors que nous sommes épuisés, énervés et pressés. Nous finissons par sentir trop de choses, trop vite, généralement sur un peu de peau déjà parfumée, planquée sou un pull qui lui-même sent déjà le mélange de deux ou trois petites choses dont un affreux adoucissant,  et par nous emballer à propos de choses dont on se dira « Mais comment ai-je pu ? » (Avec le temps, ça ne m’arrive quasiment plus, mais que ce lui qui ne s’est jamais fait avoir jette la première pierre !) et, dommage collatéral gravissime, à passer à côté de chefs d’œuvre qui avait tout pour nous combler.

J’aime bien tester le matin, au saut du lit. À l’heure du petit déjeuner. J’ai le nez frais, de larges pans de peaux libres et exposés et je ne suis pas encore de mauvaise humeur. Plus que sur le poignet, c’est au creux du coude que j’aime sentir. Et je dois prendre mon temps pour sentir, parce que les parfums évoluent. (Parfois.) Et j’aime comparer. Prendre mon temps pour aller de l’un à l’autre. Les qualités d’un parfum, ou ses défauts, apparaissent parfois plus nettement quand on en a plusieurs à sentir en même temps. Sentir, oublier, revenir et se demander si on ne s’est pas trompé parfois. Aller se savonner vigoureusement d’autres fois aussi. Se laisser rêver et imaginer. (Bien sûr, pour tester vraiment, on ne se parfume pas, on ne mets pas de bougies parfumées, même éteintes!, dans la pièce, on fait attention au savon qu’on utilise et on se méfie des laits pour le corps. En théorie.)

En ce moment, pas de bol pour l’Olfactorama, je me mouche beaucoup et je teste donc entre deux sniffs puisque la saison est au rhume des foins. Mais la chaleur, la chaleur humide, va bien aux parfums, elle les déploie, met chaque facette en valeur. On ne devrait pas tester en hiver. (Je sais, si comme moi vous vivez un peu dans le nord, ce n’est pas très réaliste ce genre d’exigence.) L’hiver, ça fige un peu les parfums. C’est bien quand on aime le vert, ça lui donne de la tenue et plus d’éclat, mais ce n’est quand même pas l’idéal pour sentir. Bien sûr, on ne devrait pas tester enrhumé, mais entre les allergies et les refroidissements, parfois les deux ensemble, je  ne testerais jamais si je m’en tenais strictement à ça !

Mais le plus important, c’est de prendre son temps. Du temps pour le parfum, du temps pour soi. Je sais qu’on en manque souvent, mais le parfum, contrairement à ce que croit le marketing, ce n’est pas «les dix premières minutes et puis c’est tout !»  (Ce qui fait que je teste le week-end principalement. Est-ce que je teste en grandeur nature ? En portant vraiment ? Ah, non ! Déjà il y a des choses que je refuse de porter ! (Qui peuvent être très belles, là n’est pas la question.) Et puis à raison de cinq catégories à cinq parfums chacune, je n’aurais pas le temps de consacrer une journée à chacun ! Mais c’est vrai qu’il faudrait.

(Est-ce que j’ai senti de jolies choses dans la sélection de cette année ? Oui. Est-ce que j’en ai senti de laides ? Hélas, oui, aussi. Mais c’est le jeu, ma pauvre Lucette !)

Commentaires

  1. Bonjour Dau,
    cette année je n'ai pas testé autant que les années précédentes, je suis un peu plus paresseuse que d'ordinaire. J'ai trouvé néanmoins de jolies choses comme ce thé blanc d'E. Arden dont j'aime bien le jus et les produits assortis (merci du conseil) mais surtout je reteste, je sens à nouveau des choses que je connaissais déjà et qui pour une raison ou une autre j'avais délaissées... Une nouveauté dont j'aime beaucoup les notes de tête mais qui devient tout simplement un parfum de rose serait Izia (Sisley) ce qui est bien dommage, il faut donc se méfier de ces dix premières minutes, si je n'avais pas l'habitude de prendre du temps et de l'écart pour réfléchir au parfum j'aurais sans doute acheté ;)
    A bientôt!
    Sara

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    1. Bonjour Sara,

      Je suis un peu paresseux aussi, c'est pour ça que l'Olfactorama, c'est bien, ça me force à sentir des choses dont certaines qui ne m'auraient pas du tout attiré ou qui ne sont pas disponibles chez moi... Izia, j'ai senti et j'ai trouvé ça horriblement banal. Pas désagréable, mais on trouve si facilement plus joli que je ne comprends pas qu'on puisse sortir ça! (Pour sentir juste la rose, je suis raide dingue de Red Roses de Jo Malone!) J'ai l'impression que la marque se repose sur ses lauriers et compte un peu trop sur son statut de marque culte qui a ses fans inconditionnels. Mais petite bonne surprise en parlant de Sisley: j'ai retrouvé un fond d'eau de campagne âgé d'une dizaine d'années dans une armoire.
      à bientôt

      Dau

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