promenade dans la forêt

"Et par le temps qu’il faisait, il éprouvait l’impérieux désir d’une promenade dans la forêt de Compiègne."

Marcel Proust, à la recherche du temps perdu, du côté de chez Swann, 1913.

Vétiver et moi, c’est une histoire assez ancienne. Nous nous aimons, nous nous quittons et nous nous retrouvons depuis presque 30 ans maintenant. Nous avons changés tous les deux mais la vieille magie est encore là. Elle renaît de ses cendres assez régulièrement. Autant certains parfums tels Habit Rouge sont compliqués, demandent à être apprivoisés, autant ce Vétiver me fait céder facilement à ses avances : il me murmure quelques notes et je lui tombe directement dans les bras.

Il m’évoque une journée en forêt.  Impression d’or pâle des premiers rayons du soleil dans son départ un peu cologne, brumes pâle des notes savonneuses et qui s’assombrissent en se poudrant, et surtout le vert vif des feuillages qui fonce à mesure que nous nous enfonçons dans les bois, se fait velours qui protège du vent ou obscurité un peu inquiétante. Et aussi, il y a le brun des troncs, des racines, sec et râpeux lorsqu’on s’y frotte. Tout cela se laisse découvrir, entrapercevoir, au fil du jour, en compagnie de ce bel inconnu, cet être imaginaire, qui habite le parfum. Il fut un aventurier brut de décoffrage, il s’est un peu assagi, policé. Il n’en demeure pas moins fort capable de vous malmener un peu pour remettre les pendules à l’heure, il continue d’empoigner, c’est sa façon à lui de caresser. Le retrouver fait du bien, autant qu’une journée au grand air après trop de semaines enfermé dans un appartement capitonné surchauffé.

Rude, dur, mais bon. 

Vétiver, Jean-Paul Guerlain pour Guerlain, 1961.

Commentaires

  1. Le vétiver est une odeur paternelle pour moi, je trouve ça confortable, rassurant. Même dans ses incarnations mal-aimables (Etro, Lalique, Lubin) je trouve le vétiver cosy. Comme les floraux aldéhydés, que je perçois douillets et moelleux, jamais hautains. Education bourgeoise de province ? Joli texte et jolies photos de rigueur.

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    1. Paternel, c'est exactement ça!
      Bon, quand il est mal aimable, on va dire que c'est un papa sévère ?

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  2. Vous en parlez si joliment...le parfum de mon amoureux lorsque je l'ai connu...et pourtant Il se glisse tout aussi facilement dans Habit Rouge.
    Je les ressens si confortables et douillets comme un territoire connu. AirBureau l'a très bien dit.

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    1. Le côté réconfortant d'Habit Rouge est plus évident. Le vétiver, il faut le côtoyer pour s'n rendre compte, je trouve. Il peut sembler un peu austère, un peu rude aux non-initiés. Bien sûr tout cela ne nous fait plus peur depuis longtemps, mais je peux comprendre ceux qui en ont peur. (Parce qu'il ont été de vilains enfants?)

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  3. Bonsoir Dau,

    Le seul à être resté capable de nous malmener, à s'affirmer sans décaper (vous avez très bien senti ses atouts..)
    J'aimais beaucoup le côté embruns salés duVétiver d'Annick Goutal , hélas discontinué , il m'en reste un, j'en use avec parcimonie ....
    Je me tâte pour décider d' un Parfum de Crise... Assez "trompe la mort" et réconfortant...

    J'hésite entre Aromatics Elixir de Clinique et l'huile Azurée pour le corps D'Estée Lauder.

    Bien à vous

    Touti..... à Paris.

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    1. J'ai mis l'Air du Temps.
      Parce qu'il est gracieux, joli, que c'est le parfum d'après la guerre, du bonheur qui revient et qu'il y a les colombes de la paix sur le flacon. Pas tout de suite, dimanche seulement. Mais je suis content de savoir que vous allez tous (?) bien!

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  4. Bonsoir Touti,
    je ne sais pas trop ce que je pourrais vous dire, simplement je suis bien contente que vous vous portiez bien. Tout le monde à Madrid est consterné.
    J'ai écrit un petit billet à Cécile (Ambre Rouge) qui habite aussi à Paris.
    A bientôt et grosses bises à tous!
    Sara

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  5. Je ne sais pas non plus quoi dire, Sara.
    Nous sommes tous tristes, tous en deuil. Sans avoir envie de reprendre nos vies comme avant, comme vendredi matin. Pourtant, il le faut, parce qu'on ne peut pas les laisser gagner, parce qu'on a besoin que l'espoir ne reste pas au fond de la boite de Pandore.

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