nouveau vert

« …cette fraîche et perçante nouveauté d’une saison reparaissante, d’un changement dans la routine… »

Marcel Proust, à la recherche du temps perdu, Albertine disparue, 1925.

B. Balenciaga est neuf. Il renouvelle le genre du bouquet vert en prenant un point de vue inhabituel. Prenez un bouquet tout ce qu’il y a de plus classique dans son vase, rapprochez-vous et faite la mise au point sur les tiges : voilà à peu près le dernier Balenciaga. Bien sûr, il faudra passer outre la laideur du flacon, abominablement cheap avec sa grosse plaquette blanche collée et son bouchon pur plastique qui se voudrait sculpture contemporaine et sombre dans le kitsch complet.

Des notes vertes et aqueuses, un peu fruitées, évoquent des tiges gonflées de sucs, juteuses, dans lesquelles on se sent presque croquer, qu’on devine sucrées.  Presqu’entièrement hors du cadre, les fleurs, des clochettes de muguets. C’est assez déroutant, j’ai eu du mal à le cerner…

Il n’a pas la verdeur fraîche et acérée des anciens dopés au galbanum, le résultat est beaucoup plus chaud et doux. Les notes fruitées, très vertes sur moi mais certains y voit de la figue (il est vrai que sur moi, même Ninfeo Moi ne sent la figue que par intermittence et beaucoup plus la forêt), le rendent assez moderne, pas d’un point de vue artistique et avant-gardiste, mais dans le sens à la mode. L’effet floral étant en sourdine évite de la jouer old fashioned. Tout cela est très réussi et parvient vraiment à faire du bouquet vert quelque chose de nouveau et de séduisant là où d'autres se contentent de sortir des néo-vintages.

J’avoue rester un peu sur ma faim cependant. Le lancement est de qualité, innovant, mais j’aurais aimé une direction plus nette, quelque chose de plus acéré pour le vert. B.Balenciaga semble vouloir nous maintenir dans une zone de confort comme le font d’autres parfums récents et très enveloppants… (Dans ce sens, je lui vois une parenté avec Narciso et avec Aromatics in White de Clinique.) C’est donc cela être moderne ? Ne pas prendre de risque ?*

B. Balenciaga, Domitille Bertier pour Balenciaga, 2014.

J'avoue avoir du mal avec ces effets de styles assez flous, séduisants au premier abord, qui finissent par me donner une sensation d’inaboutissement. Je comprends qu'on aime la coupe "relaxe" mais je préfère les modèles un peu structurés.

Commentaires

  1. Bonjour Dau,

    Il est vrai que nous avons tendance à attendre des verts plutòt acérés-culottés, je crois comprendre que pour ce lancement, que je n'ai pas encore testé, Balenciaga a hésité à courir trop de risques (le tsunami glucosé est difficile à combattre) en tout cas, ce jus vert humide est une bonne nouvelle .
    Cordialement,
    Sara

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    1. Honnêtement, je ne suis pas certain que la marque soit timide: un parfum vert est un risque et Balenciaga ose prendre une voie qui n'est pas la tendance dominante. simplement, il réussi à être moderne en jouant sur les codes enveloppant-rassurant de l'époque. ça ne pose donc pas le parfum comme un OVNI et ça permet de renouveler le propos. Mais comme pionnier, B. tâtonne un peu.

      (Et j'avoue que le confort, le parfum doudou, ce n'est pas mon registre...)

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