violette floutée


"Elstir qui, obligé de rester enfermé dans son atelier, certains jours de printemps où savoir que les bois étaient pleins de violettes lui donnait une fringale d’en regarder, envoyait sa concierge lui en acheter un bouquet; alors ce n’est pas la table sur laquelle il avait posé le petit modèle végétal, mais tout let apis des sous-bois où il avait vu autrefois, par millier les tiges serpentines, fléchissant sous leur bec bleu, qu’Elstir croyait avoir sous les yeux, comme une zone imaginaire qu’enclavait dans son atelier la limpide odeur de la fleur évocatrice."

Marcel Proust, à la recherche du temps perdu, la prisonnière, 1923.


Fahrenheit, Christian Dior
Ce weekend, je me suis donné le petit plaisir de re-sentir Fahrenheit de Dior. Difficile pour moi de le situer, d’en parler, l’ayant connu à l’époque de sa gloire, quand il était LE parfum pour homme que chacun voulait, que chacun aimait, probablement parce qu’il rompait franchement avec les codes habituels.

Fahrenheit, c’est une violette, une feuille de violette, dans un décor de sous-bois, un décor à l’aquarelle qui me semble devenu plus aqueux que par le passé. (Ma mémoire embelli peut-être ?) Ce qui me frappe aujourd’hui, c’est le manque d’équilibre du parfum, comme si on n’avait pas réussi à choisir ce qu’il devait être : une violette avec décors ou un sous-bois avec violette ? J’ai une impression de parfum hésitant, de demi-mesure. L’impression que j’essaye de prendre une photo et que mon appareil n’arrive pas à focuser sur l’élément qui m’intéresse et ne me donne à voir qu’une image indistincte plus ou moins floue.

Reste que Fahrenheit est encore agréable à sentir. Il n’est peut-être pas à la mode comme Dior Homme, peut-être pas devenu un classique honorable comme l’Eau Sauvage, mais je le sens assez régulièrement ; il semble qu’il fasse désormais partie de ces parfums devenus des parfums de beaufs, choisis parce qu’ils sentent bon et qu’il plaise aux femmes… 

Fahrenheit, Jean-Louis Sieuzac et Michel Almairac pour Christian Dior, 1998.

Commentaires

  1. Bonjour Dau,
    Question de climat peut-être, la violette de Fahrenheit devient extrêmement violente à Madrid, dérangeante même.
    Cordialement,
    Sara

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    Réponses
    1. C'est un parfum des années '80 et il est vraiment très présent. Pour peu qu'on en abuse, il est vraiment envahissant... même dans le nord. :)

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