Cette semaine, le ciel était d’un magnifique azur très pur
qui avait des duretés de porcelaine et j’ai beaucoup porté dans le bleu qui
pétille (Serge Lutens : ICI) qui était encore plus joli dans ce froid sec
et vif, plus fin, plus intense, plus intrigant… C’était un de ces semaine où
j’aurais dû être joyeux, un peu plus léger dans cette lumière qui annonçait le
printemps, d’autant que j’essaye et aime de nouvelles choses dans ma salle de
bain mais je ne me suis pas senti particulièrement bien. Je n’ai même pas à
vrai dire eu la sensation de la lumière. J’étais hors de ma zone de confort,
dans une zone de demi-teintes, d’ombres et de flous, une zone de malaise.
Je me suis senti dans la zone of interest. Si vous n’avez
pas vu le film de 2023, vous devriez. C’est le film qui raconte le quotidien de
la famille Höss pendant la guerre. Une vie de famille tout ce qu’il y a de plus
normal : les enfants font du vélo, on plante des fleurs dans le jardin,
maman veille à la tenue du ménage, surveille les bonnes, se maquille, est
coquette et papa va travailler… Mais la jolie petite maison est juste à côté du
camp d’Auschwitz. Les fumées sont celles des fours crématoires, les bonnes sont
menacée du camp quand elle discute et papa quand il va travailler essaye avec
un grand souci d’efficacité, en bon petit industriel, de faire disparaître le
plus possible de gens le plus vite possible.
Le voisinage de l’horreur et de la normalité est glaçant. The
zone of interest n’est pas un feel good movie, c’est la zone de l’inconfort et
du malaise absolu. C’est la zone dans laquelle je me sens régulièrement en ce
moment. Comme di Kim (ICI) heureusement qu’on a des petites choses qui nous
font nous sentir bien, tenir le coup et nous empêchent de nous effondrer. Mais
comment oublier, au sens de nous n’oublions surtout pas et ne voulons pas
oublier, l’Ukraine ravagée par la guerre, la Palestine sous les bombes, les
saluts nazis en Amériques, la montée de l’extrême droite un peu partout…
Comment oublier que nous sommes, nous aussi dans une époque de plus en plus
barbare et continuer à survivre ?
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Mon but n’est absolument pas de jeter la pierre ou
culpabiliser, juste d’exprimer ma propre culpabilité, mon malaise. J’ai
toujours considéré que parler de futilités était important et que, quand on
causait esthétique, donner un contexte mettait les choses en perspective, d’où
les billets d’humeur, certaines photos du quotidien, quelques choses qui donne
du sens, enracine toute cette superficialité. Alors, voilà, aujourd’hui, c’est
dur de s’habiller comme une pute, de mettre du fond de teint et d’emmerder les
députés de l’Union pour l’Ordre Moral. (On a changé de salle, c’est une autre
ambiance, oui, oui.) Mais c’est important de continuer et de défendre ce qu’on
croyait avoir et qu’on veut nous reprendre parce que, la grande, l’inoubliable,
Zaza Napoli, à sa façon, elle est aussi en première ligne. Pour l’instant, on
rit dans la rue, on se moque, mais bientôt on l’interdira et on l’enverra
peut-être dans un camp comme c’est parti. Et est-ce qu’on a vraiment envie de
continuer comme ça ? De recommencer ça ?
L'époque est effrayante et j'ai en tête en permanence la phrase qui revient dans chacune des trois nouvelles du livre "Abbés" de Pierre Michon: "Toutes choses sont muables et proches de l'incertain".
RépondreSupprimerJ’essaye de rester légère mais ce monde me fait peur, l’extrême droite, ces saluts, les mots horribles et les réflexions irréfléchies de ma belle-mère (je ne l’apprécie pas mais là moins je la vois mieux je me porte)….je fuis le monde dès que je suis en repos en allant randonner dans mes montagnes adorées. Mais au fond de moi, les mots de mon grand-père raisonnent : « l’être humain oublie trop vite ». Belette.
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