toucher le fond

“À la fin, elle s’éloigna, indicatrice, diligente, parmi les ramifications de son parfum, laissant sur le visage de Swann le reflet de son sourire.”

Marcel Proust, à la recherche du temps perdu, du côté de chez Swann, 1913.

La fin d’un flacon est toujours un moment particulier, surtout lorsqu’il s’agit d’un vintage, d’une œuvre qui n’existera plus, qui sera définitivement morte lorsque les dernières gouttes sont vidées.  J’essaye de ne pas avoir de regrets. De me dire que « tant pis, il fallait bien que ça arrive ! » parce que le parfum serait tout aussi mort, enfermé dans un flacon. À quoi servirait un parfum non porté ? Il a besoin de la peau pour vivre, besoin d’être sillage pour exister. Du vinaigre tourné au fond d’un flacon, ça ne m’intéresse pas le moins du monde.

Parfois, je retrouve le parfum, parfois, j’ai du stock. Mais dans le cas de Bellodgia, que je trouve beau mais difficile à porter, je sais que c’est définitivement fini, qu’il n’y aura plus que mon souvenir. Mais j’essaye de ne pas m’accrocher, ni à lui, ni à un autre, d’aller de l’avant, de trouver, encore et toujours, des choses belles qui me donneront du plaisir. Bien sûr, vous savez ce que je pense de la modernité, que je n’ose trop lui demander tant je la trouve décevante, mais je ne me résigne pas à vivre dans un musée ou au milieu de reliques. Du moins, pas tous les jours. C’est une part de soi qu’on laisse parfois avec un parfum, mais il faut savoir se réinventer et surmonter ces, fort petits, deuils. Bien sûr le pincement au cœur est là, mais nous savons tous qu’il y a aussi des choses bien plus graves, hélas !, dans la vie… Et puis, nous ne pouvons quand même pas faire du sur place, n’est-ce pas ?

(Evidemment, je continue à pester lorsque le beau patrimoine se perd, etc. Ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit.)



Commentaires

  1. Bonjour Dominique,

    J'éprouve beaucoup d'empathie pour votre tristesse de voir se terminer un flacon. La fin d'un flacon est toujours la fin d'une histoire et il faut sans doute faire une sorte de deuil. Les souvenirs olfactifs étant parmi les plus vifs, il est d'autant plus difficile de les laisser s'envoler... Conservez votre bouteille dans un endroit douillet et fermé. Elle gardera longtemps ses arômes... C'est ce que j'ai fait avec mon petit flacon de Diorissimo... Il niche maintenant parmi mes écharpes, leur donnant un bel arôme d'un muguet immuable.

    Pour vous consoler un peu, j'ai trouvé sur le site de FragranceX, quelques éditions des parfums Caron... Évidemment, je ne peux me prononcer sur leurs nouvelles formulations. Elles sont peut-être décevantes, mais cela vaut le coup de jeter un oeil. FragranceX est un site honnête qui ne vend pas d'imitations. Je fais affaire avec eux depuis 2-3 ans maintenant. pas de soucis http://www.fragrancex.com/search/search_results?sText=caron&currentPage=1&searchSortExpression=1

    Je vous souhaite une belle journée et bon courage...

    Sophie

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  2. Bonjour Sophie,
    Pour Bellodgia, j'en fais volontiers mon deuil, j'avais du mal à le porter. Sentir un flacon vide car je l'aime quand même me conviendra tout à fait. Pour les autres, que je veux absolument, en général, j'essaye de faire du stock avant d'avoir touché le fond... et puis parfois non. Prochaine angoisse= le Dix de Balenciaga. Je vais avoir BEAUCOUP de mal, là!

    Nous verrons bien...

    Dominique

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