Dear Aunt Jane...

"Mais quand une jeune fille est destinée à devenir une héroïne, l'obstination perverse de quarante familles des environs ne peut rien y faire"

Jane Austen, l'abbaye de Northanger, 1817.

Il n’y a pas que Proust dans ma vie. Et ce blog aurait aussi bien pu se nommer d’après l’un ou l’autre des titres de Jane Austen. Il est vrai que son talent de miniaturiste explore moins d’aspects de la vie et de la pensée que celui de Proust, chose qui s’explique aisément par une vie très retirée du monde, même si la campagne anglaise n’est pas non plus le fond d’un couvent.

Jane Austen, oeuvre romanesque complète, tome II, bibiothèque de la pléiade.
Jane est une compagne de longue date qui me charme toujours autant à chaque relecture. Elle me fait rire, plaçant dans ses œuvres des morceaux de comédies absolument désopilants, avec un sens de la satire presque cruel pour ses personnages. C’est toujours un peu indigné que je l’entends traitée d’auteur romantique pour jeune fille. Bien que ses romans traitent tous de la question du mariage des jeunes filles, elle n’a rien de romantique, au contraire: elle est raisonnable, classique et trop lucide que pour être romantique. D’ailleurs, Northanger Abbey, l’un de ses premiers romans, est une parodie d'œuvres gothico-romantiques. 

La lecture de Jane est infiniment consolante parce qu’elle est drôle, optimiste, et qu’elle remet toujours les pieds sur terre et l’église au milieu du village. Une tasse de thé et Jane suffisent pour que le monde autour de moi n’existe plus. Bien que la situation ait changé, que le monde ait évolué, c’est une lecture encore pertinente et actuelle, parce qu’elle touche, l’air de rien, à des questions qui sont éternelles : le couple, oui, mais aussi l’éducation, la classe sociale et la place attribuée à chacun, et aux femmes en particulier,  dans la société, etc. Bien moins de questions esthétiques et de philosophie de la vie que chez Proust, mais une réflexion très pratique et concrète qui s’immisce, le temps d’une question, d’un trait d’esprit, dans le roman.

Pour la lire, le seul parfum autorisé devait être une cologne très simple à la mode de son époque ou une belle eau de lavande (que je n’aime pas), mais j’avoue tricher un peu, un tout petit peu, en portant souvent du Goutal. Pas l’eau d’Hadrien, trop italianisante, mais l’Heure Exquise et son ambiance de jardin ou Grand Amour, le joli bouquet posé sur la console. Pas des parfums que les héros de Jane auraient portés, mais des ambiances dans lesquelles ils auraient pu baigner.

Commentaires

  1. Bonsoir Dau
    Vous le savez déjà je suis une grande fan de Jane Austen avec un petit faible pour Persuasion, écrit dans les dernières années de sa vie. L'histoire de cette jeune femme restée vieille fille parce que sa famille avait jugé son prétendant pas assez bien socialement ni assez riche pour eux, et qui le revoit quelques années plus tard couvert de gloire et de richesses alors que sa propre famille est ruinée, particulièrement cynique.
    Effectivement, je vois bien Grand Amour pour les héroïnes de Jane Austen : un grand bouquet de fleurs blanches qui arrive à maturité juste avant d'être fané, comme ces jeunes filles qui n'en finissent pas d'attendre le prétendant idéal mais qui n'ont pas la dot suffisante pour les attirer.
    Je les verrais bien avec Écumé de rose des Parfums de Rosine : la rose pour leur côté faussement romantique mais avec le côté sauvage des embruns marins, pour rappeler que ces héroïnes, comme l'Elisabeth d'Orgueil et Préjugés qui courait la lande anglaise au petit matin.
    Bien à vous
    Cécile

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    1. On ne dira jamais à quel point Austen est merveilleuse et comme peu souvent le cinéma lui a rendu justice! Pour Raison et sentiment et la marche dans la campagne, j'avais pensé à l'Eau de Camille qui sent bon l'herbe! Et pour Orgueil et préjugé à l'eau de campagne parce qu'Elizabeth a ce côté très pratique de fille qui va au potager et voit la campagne comme un lieu où on produit à manger plus que comme un décor romantique. La plus florale, c'est pour moi Emma la pimbêche qui est beaucoup plus coupée du réel, moi que la romantique soeur d'Elinor, et la plus "intellectuelle." Celle qui réfléchi, mais mal, celle qui combine...

      Persuasion est aussi mon préféré, je crois. Cette pauvre Anne, littéralement séchée sur pied, m'émeut toujours. D'autant qu'au rayon de la famille, c'est peut-être la moins gâtée puisqu'il semble qu'elle ne puisse vraiment compter sur personne, aucun appui, puisque sa seule amie, un peu sensée, est aussi celle qui a fait son malheur. (Elle change d'avis de bon gré, certes, mais s'il avait été trop tard pour le capitaine Wentworth, elle eut pût changer d'avis autant qu'elle le voulait que cela n'aurait rien changé à l'affaire...

      Bref, nous pourrions disserter des heures...

      à bientôt
      Dominique

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  2. Excusez-moi si ma syntaxe vous paraît bizarre, c'est la première fois que je réponds d'un smartphone... J'ai pas encore la pratique...

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