quelques fleurs

 


Si j’étais un blogueur pro, je parlerais de nouveautés en parsemant ci et là de quelques grands classiques pour la crédibilité selon un programme bien établi et régulier mais je suis un abominable dilettante qui n’en fait qu’à sa tête, se dit parfois que ce serait bien de mais préfère toujours suivre le caprice du moment. Et mon obsession du jour, c’est quelques fleurs l’original d’Houbigant. L’automne et ses chypres, ses brumes, ses encens et ses feuilles mortes ramassées à la pelle, c’est merveilleux mais le printemps éternel en flacon et son optimisme hors sol, c’est parfaitement charmant.

 



Je me refuse à rentrer dans une polémique sur la fidélité ou non à l’œuvre d’origine car nous ne saurons jamais. La palette a changé, certaines matières sont tout bonnement interdites, et le genre se prête mal à l’utilisation de vintage de plus de 100 ans. Ce qui est certain, c’est que l’effet est bien là et que, s’il y a réinterprétation, semblable à celle de Cecil Beaton pour My Fair Lady, on peut pleinement l’apprécier.

 



Quelques fleurs, le nom ne ment pas, c’est un bouquet harmonieux, léger et frais, un peu vert, très « comme il faut » et romantique. Un énorme bouquet. Avec beaucoup de fleurs. Rien de lourd ou d’étouffant, il y a une certaine légèreté, mais opulente. Rendu lumineux par les aldéhydes et quelques aromates au départ, c’est un ensemble pastel qui décline les nuances de jaunes pâles, de bleus pastels et surtout explore la gamme des mauves belle époque avec des lilas très présents qui parent le parfum d’un effet aussi délicat et délicieux que celui des cerisiers du Japon en fleurs dans tous les dramas coréens romantiques produits par Netflix. (Avis personnel : quelques fleurs est beaucoup plus adapté aux scènes romantiques avec cerisier en fleurs des K-dramas que tout les essais modernes de type Cherry Blossom et thé matcha qui me semblent toujours un peu cheap.)

 



Définitivement passé de mode, tourné vers le temps d’avant, ce parfum est hautement nostalgique, plus que rétro et semble un élégant refus des brutalités du temps. Il se tourne vers un ailleurs rêvé, imaginé, fantasmé, un ailleurs qui n’est plus et n’a probablement jamais été, un ailleurs qui appuyé sur ses notes vertes et ses mousses, nous transforme toutes et tous en éternelles jeunes filles en fleurs. Ce n’est peut-être pas un chef d’œuvre impérissable, mais c’est indispensable que ce genre de parfum existe encore, qu’il soit toujours porté, donné à sentir même à ceux qui le bouderont car ils ne le trouveront pas assez moderne. Il y a dans son aura faussement simple, une sophistication très naturelle qui lui donne un charme fou et le rend délicieux à porter, avec une discrète animalité équilibrée par des notes savonneuses très grande dame. S’il date de la même année que l’heure bleue, il est probablement plus impressionniste que le Guerlain et peut-être plus aimable avec l’âge, quoique moins sensuellement séduisant. Mais il passera aussi bien sur les petites filles modèles que sur leur grand-mère.



 

Et comment ne pas aimer ce flacon ?

 

 

 

Quelques fleurs l’original, Robert Bienaimé pour Houbigant, 1912.

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Commentaires

  1. Tes descriptions des parfums sont toujours tellement agréables à lire. Merci. Belette.

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    1. Tellement d’accord avec Belette ! Ce matin, tes Qq fleurs me plongent dans une douce bulle irisée dont j’avais bien besoin.

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    2. Oh, un grand merci à toutes les deux!

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  2. Merci, chez Dau, pour cette poésie et cette qualité d'écriture!

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