ambre gris


J’ai donc reçu il y a quelques temps déjà les trois parfums de la nouvelle marque Anonim. (Ne me demandez pas pourquoi, je n’en sais rien.)  LA marque se lance sans dévoiler quel parfumeur est derrière pour ne pas nous influencer dans notre ressenti des parfums. L’ambition est louable. Mais on sent déjà quel est le public visé. La plupart des gens connaissent une marque et se fichent royalement du nom du parfumeur qui a crée le jus. On vise donc les perfumistas. Alors, intention louable et cou publicitaire pour faire parler de soi parce que l’effet escompter est probablement des « c’est qui ? T’as une idée ? » à n’en plus finir. Et aussi de ne pas subir l’humiliation en cas de plantage. C’est pratique !

Bien sûr, c’est de la niche nichue et il y a une thématique matière. L’ambre gris. La sécrétion du cachalot qu’on ramasse sur les plages, pas l’accord ambré caractéristique et assez doux. L’ambre gris, c’est capiteux, animal, un peu salin et musqué. Et c’est cher. Le positionnement extrait est luxueux. Certains se demanderont immédiatement si on en a pour sont argent, je peux répondre oui directement, tout diffuse, tout est extrêmement tenace. J’ai du mal à le comprendre, moi qui me réjouis autant d’une cologne de deux heures que d’un oriental qui résiste à la lessive, mais pour certains, c’est un vrai critère de choix. (Ils diront peut-être de qualité, mais je refuse d’employer ce termes pour ça !) Ils seront comblés.

Le premier testé fut le Black Ambregris, un parfum aux notes de chocolat épicé et fumé qui laisse percevoir l’ambre, comme si l’odeur de la peau s’exhalait au contact du parfum. J’avoue que la surprise fut bonne. Une odeur de chocolat, j’ai d’abord fait la grimace et voulu aller me laver la mains parce que c’est un peu tout ce que je déteste, mais ça n’est pas particulièrement gourmand et sucré, c’est plutôt une ambiance sombre, dans un club à l’éclairage tamisé et au murs couleur chocolat, des liqueurs, une peau échaudée par la danse et une haleine de fumeur de gitanes. Bon, personnellement, je ne vais pas plus dans les club que je ne mange de chocolat, mais l’idée me déplaît moins. C’est assez réussi comme parfum dans le genre « gourmandise obligatoire. »

Golden Ambregris se veut animal. Effectivement, on ne ment pas à ce sujet. Une forte dose de civette emmené en fanfare un accord ambre gris et cuir. Enfin, emmène en fanfare… C’est LE parfum qui cible les perfumistas, les vrais les purs et durs, pas les chochottes mainstream. Bref, c’est fait pour ceux qui ne jouent pas les dégoûtés parce que, eux, ils savent, que le parfum ça sent aussi le sale et la bête. Résultat : pendant les deux premières heures, on a l’impression d’avoir marché où il ne fallait pas marcher et que l’odeur de la merde nous poursuit. Oui, je sais que le parfum, ce n’est pas que sentir le bien lavé ou le paquet de bonbon, merci. Mais on peut être un vrai perfumista et être un peu subtil, vous savez ? J’aime beaucoup le fond vraiment pas propre de mon Calèche vintage parce que c’est un délit d’initié, pas une provocation gratuite. À mon avis, si vous ne sentez ça sur personne et que les gens font la grimace sur votre passage, c’est peut-être que vous vous êtes ratés… C’est LE parfum positionné marque culottée mais culotte sale. Et j’ai sous-titré mon blog « parfois sans culotte » vous imaginez ce que j’en pense: plutôt Calèche vintage ou un bon vieux Kouros.

Silver Ambregris, c’est le classique de la bande, l’indispensable qui assure la crédibilité. Des fleurs exotiques lancées par un peu d’agrume et surtout, cet ambre qui transparaît très vite et donne à l’ensemble le charme d’une peau chauffée par le soleil, salée et salie par la mer. Ça évoque un peu le même genre d’effet que Fidji en fait. En moderne et moi « madame », ce qui n’est pas bien difficile, remarquez ! Ça sent le bobo qui rêve de vacances et c’est plutôt sympa. Je sais que c’est écologiquement catastrophique, mais m’entendre dire « On plaque tout et on va passer le week-end aux Maldives ! » je trouve que ça ne manque pas de charme.  C’est celui que je préfère, parce que je suis classique et dans la cible, mais aussi parce que c’est le plus subtil de la bande, celui qui intrigue…

Maintenant, que dire de ce genre de lancement ? Je ne sais pas. Vraiment. J’aime bien qu’il y ait de nouvelles marques, que le marchés du parfums soit dynamique et créatif, que les choses bougent. Mais est-ce vraiment créatif ? Est-ce que ça exprime une vision ou la volonté de plaire à un certain type de consommateurs ? Et est-ce que les perfumistas ont vraiment besoin de ça ? Besoin de se ruiner pour sentir beau ? Alors, si vous voulez le rare, oui, pour vous, ce sera peut-être une bonne nouvelle ce genre de lancement. Mais si vous pensez que le beau pour tous est important et que vous aimez bien sentir votre parfum sur d’autres, parce que ça donne gentiment l’impression d’appartenir au même club, que ça crée une connivence, vous continuerez probablement de vous tourner vers de vieux classiques oubliés qui traîne sur les étagères du bas de la parfumerie la plus proche de chez vous ou dans les limbes d’internet…

Black Ambregris, Golden Ambregris et Silver Ambregris, Anonim, 2020.

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