"Elle habitait un petit hôtel très étrange avec des chinoiseries."
Marcel
Proust, à la recherche du temps perdu, du côté de chez Swann, 1913.
le baiser du dragon, cartier opium, Yves Saint Laurent |
Instagram m’a
gentiment fait souvenir que j’avais dans mes tiroirs le baiser du dragon et que
je ferais bien de vous en parler tant qu’il est encore assez facilement
disponible. Ce parfum a été un échec marketing total. Sorti en 2003, il était
totalement à contresens. À dire vrai, il semblait plus né dans le vaste sillage
de l’Opium de Saint Laurent avec son inspiration orientale appuyée. Si Yves Saint Laurent avait fait une
collection chinoise, Cartier avait fait de même. (Pour séduire les nouveaux
riches chinois ?)
Au-delà du
flacon, très joli, et du nom, ce baiser du dragon était pourtant un fort joli
parfum, original et distinctif qui tournait autour du vétiver en évitant le
piège de la monomatière joliment sertie que je trouve si ennuyeuse. Le départ
joue sur l’amande, mi amère mi liquoreuse. (Avec une pointe de néroli pour
faire décoller ça.) La présence du vétiver évite les connotations alimentaires
et raidit joliment l’ensemble. Le parfum est sec, serait austère, si ce
n’est qu’il possède une jolie patine luxueuse.
Le cèdre
durcit l’ensemble mais une note florale de rose, très transparente, qui passerait
presqu’inaperçue, donne beaucoup de charme à l’ensemble alors que le vétiver
est de plus en plus présent. Il règne sur le fond oriental, marié au patchouli et
au benjoin, au sillage androgyne et moderne. Et quelle bonne idée d’avoir refusé
les excès vanille-tonka qu’on trouve souvent dans ce genre de composition.
À vrai
dire, si ce baiser séduit, c’est parce qu’il ne joue pas la carte « sensuelle »
habituelle. Son exotisme, étrange, un peu bizarre, a l’élégance hautaine de ce
qui vient de chez le bon faiseur. (Les orientaux peuvent si facilement sombrer
dans la vulgarité !) Sophistiqué, évolutif, changeant selon la météo et
les supports (peau, tissus) Certain jour, je perçois surtout le patchouli, un
peu cacaoté, parfois le benjoin très présent me donne l’impression d’évoluer au
milieu des fumigations de papier d’Arménie.
Il aurait probablement trouvé son public dans une marque de niche ou sa façon distinguée
d’évoquer les fastes d’une Cité Interdite de roman aurait fait rêver ceux qui
acceptent de prendre leur temps.
Le baiser
du dragon, Alberto Morillas pour Cartier, 2003.
Une bien belle description de ce parfum que je n'ai jamais eu l'occasion de humer ! Tout n'est pas perdu...
RépondreSupprimerIl est encore trouvable sur internet, mais ce sont des stocks qu'on liquide...
SupprimerOui, merci, j'aime bien ces ventes en ligne de produits moins chers, qui nous permettent de partir à la recherche... de nos souvenirs...
Supprimerquel nom merveilleux pour un parfum et si bien présentée dans ces petits tiroirs au papier japonisant. j
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