casual

"Elle allait en robe de chambre donner à manger à ses paons..."

Marcel Proust, à la recherche du temps perdu, Sodome et Gomorrhe, 1922.

libre, Yves Saint Laurent
Depuis quelques temps, la parfumerie semble s’adresser à des adultes et non plus guetter les petites filles à la sortie des écoles en leur tendant un paquet de bonbons. Il y a des choses un peu plus adultes, plus mures et un peu moins violentes qui sortent et ce n’est pas moi qui m’en plaindrai. À l’image de Mon Guerlain offrant un parfum au jeunes femmes après avoir (mal !) fagoté les gamines en petite robe noire, Yves Saint Laurent rhabilles les Black Opiomanes ingénues en leur offrant Libre qui, comme le Guerlain, surprise, surprise, revisite la lavande et le genre fougère.

De façon irrationnelle, je suis amoureux du flacon que je trouve sublime de beauté et qui m’évoque un gros bijou Saint Laurent dessiné par Loulou de la falaise. (Chacun son idole Saint Laurent, je suis team Loulou pour toujours!) Il reprend le logo de la maison, c’est doré, mais pas kitsch pour deux sous. (Ou alors juste un peu ? Non, c’est baroque plutôt, on va dire ça !) 

Mais le jus ? Un départ un peu cassis sucré et mandarine, le tout très discret, juste là pour installer les notes suivantes. Le bouquet en cœur est un duo fleur d’oranger lavande, assez surprenant. D’abord je n’ai senti que la fleur d’oranger assez lumineuse et je me suis dit « Oh, non ENCORE une fleur d’oranger ! » un peu dépité de la sentir partout. Une autre fois, la lavande m’a surpris par sa présence enveloppante sur fond de muscs vanillés qui la réchauffent, la poudrent, donnent du moelleux à sa touche barbier. Très discrète la touche barbier! Juste assez pour faire androgyne et donner un petit frisson de transgression à ces rares clients qui respectent encore scrupuleusement les étiquetages femmes-hommes dans les parfumerie. Doux mais pas trop, propre mais pas trop, Libre ratisse large pour plaire à beaucoup, est marketé, mais ne donne pourtant pas cette impression de flatter outrageusement le public en encourageant son mauvais goût. (Ouf!)

Certes, Libre n’est pas totalement innovant, j’ai déjà cité Mon Guerlain, mais je pourrais parler de Burberry Britt ou évoque Pour Un Homme pour l’idée de lavande vanillée. Quant aux muscs confortables, comment ne pas penser à Allure ou Joy, en mode plus décontracté ? Son comportement est plutôt une bonne surprise. Si la structure pourrait être simple, on a quelque chose qui, sans chercher la sophistication, offre des nuances, de l’évolution, sans tomber dans la caricature des notes scandées violemment. 

Le parfum est douillet, confortable. Plus plaid et soirée Netflix que ne le font envisager le flacon et la campagne de pub, mais avec une petite note sombre en fond (due au cèdre revendiqué ?) qui le charpente et lui évite d’être un parfum trop gentil, trop mignon. Il est plus jeans que smoking, mais Monsieur Saint Laurent ne regrettait-il pas de ne pas l’avoir inventé ? On lui pardonnera donc d’être casual, surtout quand on aime traîner en robe de chambre, et, pour ma part, je peux tout à fait envisager de le porter aussi à la ville. De temps en temps. À la place d’un allure ou d’un Joy. Pour les jours ou les tiares sont un peu trop lourdes sur mon front... 

Libre, Anne Flipo et Carlos Benaïm pour Yves Saint Laurent, 2019.

Commentaires

  1. Plus plaid et netflix... c’est bien aussi les parfums doudous.
    Belle journée

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    1. Ah, oui! Un peu de confort à l'occasion, on aime...

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  2. Bien contente de trouver un avis sur ce nouveau parfum ! Mais encore et encore un départ cassis sucré et mandarine...
    Le flacon est magnifique, il était inutile de mettre ce bouchon asymétrique, cela lui enlève de sa classe... Je trouve, c'est mon humble avis...

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    1. Franchement, la pointe sucrée du cassis est discrète, c'est plus par opposition au bourgeon qui lui est vert et aigu qu'il faut parler de sucre pour la baie. Oui un autre bouchon, pourquoi pas, mais celui-ci ne me gène pas du tout. Je l'aime comme il est ce flacon!

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  3. Testé aujourd'hui et il me plaît bien. Une fleur d'oranger un peu charpentée, pour moi plus automnale, et très confortable, les bois et la lavande qui l'empêche de se vautrer dans le sucre.... Je pense me laisser tenter 😉

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