« Ils n’ont même pas eu la force d’esprit de se débarrasser de toutes les banalités de forme acquise par l’imitation. »
Marcel Proust, à la recherche du temps perdu, le temps retrouvé, 1927.
Il y a des noms qu’on n'oserait plus. Safari est quand même un peu puant, évocateur de colonialisme joyeux (comme le colony de Patou) et de massacre d’animaux sauvage. Sorti juste avant le politiquement correct, ce nom se voulait un hommage à Out of Africa et à une collection Ralph Lauren pleine de sahariennes dans les tons sables. Pourquoi pas si on tient compte du fait que le style de Ralph Lauren a toujours été inspiré par l’histoire même si romantiser un tel passé n’est pas une bonne chose. Mais ça permet un joli flacon, visiblement inspiré d’un nécessaire de voyage ancien. Quant à l’odeur…
Curieusement, pour décrire Safari, la première chose qui me vient à l’esprit, c’est de dire qu’il sent le parfum ! C’est un chypre vert, très floral et très classique. Il peut sembler aigu à la vaporisation, mais le galbanum, le cassis et la jacinthe se calme très vite pour laisser la place au bouquet très rond, un peu aldéhydé qui tient la vedette, passablement fleur d’oranger jasmin, sur fond vétiver patchouli suffisamment discret que pour ne jamais faire « masculin » traditionnel. Il est même arrondi, encore un peu plus, par une petite note orangée, miellée. On est renvoyé à plein de classiques de la parfumerie, mais sans jamais les citer, sans pouvoir mettre un nom dessus.
Personnellement, je trouve Safari très artificiel, il ne me renvoie à aucune odeur naturelle, il sent « le parfum » comme je l’ai déjà dit. Et très synthétique aussi, dans la mesure où il me fait penser à beaucoup d’autre sans que je puisse dire qu’il les copies, mais il évoque nettement la période qu’il a précédé. Ce qui n’est pas forcément une mauvaise chose, vous savez à quel point j’aime le rétro, les choses anciennes et les parfums modernes qui font penser aux parfums anciens. Mais j’ai du mal à trouver une quelconque poésie à Safari. Pour moi, aucune magie n’opère, il ne me fait penser à rien.
Tout ce que je parviens à imaginer est loin du Safari et de l’Afrique. Je trouve que ce parfum sent l’électrice républicaine, aussi middle class que middle aged, qui rejoint ses copines pour le thé après la visite d’une exposition consacrée aux impressionnistes. Elles sentent bon le parfum dans leurs tailleurs bien repassés et elles vont passer leur temps à dire du mal de ces femmes plus flamboyantes, plus chic qu’elles, ces femmes qu’elles envie sans oser les imiter. C’est impeccable, bien coupé, adapté aux circonstances, mais ne fait pas beaucoup rêver. À force de vouloir être classique, on peut devenir terriblement ennuyeux et manquer son coup.
Safari, Dominique Ropion pour Ralph Lauren, 1990.
Très beau blog ! Bonjour !
RépondreSupprimerAh, ce Safari !....je m'en souviens effectivement comme d'un beau parfum vert mais que je n'avais pas acheté.
Moi qui venait du Numéro 19, de Silences de Jacomo, de Fidji, Cristalle Chanel,(en autre).
Je vois encore la crème corps dans son lourd pot en verre gravé et son bouchon argenté façon loupe d'orme.
J'ai toujours adoré les lignes pour le corps... cette crème corps me faisait envie avec cet apparent luxe ostentatoire (à mes yeux).
Avant, on avait des lignes pour le corps merveilleuses (gel douche, lait, crème,huile bain, etc).
"Mais ça, c'était avant" (comme disait la pub)^^
La remarque concernant OUT OF AFRICA est très juste. Do You remember la toute première pub AXE dans les années 80 avec la musique D'HATARI, un aéroport dans la brousse, le tarmac et la blonde qui se trouble en respirant le deo du bel inconnu ?
C'était ça pour moi, SAFARI Ralph LAUREN.
Nostalgie....
Oui, je me souviens aussi du pot de la crème corps qui était magnifique et qui devait peser si lourd dans la main... Le genre de pot qui n'aurait pas dépareillé une scène de Downton Abbey en fait! Je ne suis pas forcément conquis par le parfum, que j'aime bien quand même, mais je reconnais que niveau packaging, c'était PARFAIT et ça envoyait du rêve.
Supprimerà bientôt et merci!
ta description est tellement bien faite que je me suis imaginée un groupe de femmes habillées en Weill, Devernois (ou daxon pour le pire, bref toute marque de vêtement qui, même avec des couleurs vive, est ennuyeuse) avec une coupe eu carré bien nette ou une permanente (voire un régécolor) en train de deviser d'un air policé dans un salon de thé un brin suranné.
RépondreSupprimerC'est ça en plein! Bon, peut-être pas saxon. Ou alors, porté avec un rang de perles véritables, mais un tout petit rang tout mesquin qui ne ressemble à rien. (On est mauvais? Juste un peu alors!)
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