citron moderne

"Ils en veulent à leur ami de s’y être livré, non comme d’une trahison, mais comme d’une déchéance."

Marcel Proust, à la recherche du temps perdu, la prisonnière, 1923.

Longtemps, nous nous sommes demandé ce que Christine Nagel ferait chez Hermès. Maintenant, nous savons, armée de son titre de gloire Miss Dior Chérie (qu’on ne peut plus sentir aujourd’hui après les reformulations successives de Demachy, mais c’est une autre histoire, elle modernise, elle part à la conquête de nouveaux publics. Twilly allait dans ce sens, l’eau de citron noir, la nouvelle cologne, va encore un pas plus loin.

Le départ est un joli citron frais et juteux, très séduisant, mais ne vous emballez pas trop vite, car après les cinq minutes réglementaires qui doivent vous décider à l’achat, arrivent, tels les quatre cavaliers de l’apocalypse, les bois ambrés. Ces bois qui piquent donnent à n’importe quel parfum de la tenue et du sillage, y compris sur le nylon du survêtement. On les voit, on les sent un peu partout et reconnaissons à Hermès le mérite de ne pas les déguiser, de ne pas tenter de les masquer, ce qui est à vrai dire chose impossible. C’est efficace et ça plaît aux jeunes et moins jeunes, un peu incultes, qui veulent que leurs parfums sentent fort et longtemps parce que s’afficher en Hermès, c’est très bien, mais il faut en avoir pour son argent de nouveau riche. (Ou d’aspirant nouveau riche.)

En termes d’esthétique, c’est à peu près aussi gracieux que le discours d’un dictateur fasciste sous amphétamines. Ce n’est pas juste une cologne ratée, c’est délibérément laid. Ce n’est pas le citron qui est noir, c’est notre tenue de deuil en apprenant qu’Hermès rejoint le clan des modernes.

Eau de citron noir, Christine Nagel pour Hermès, 2018.

Commentaires

  1. 100% d'accord !
    A part les premiers instants c'est fort moche !

    RépondreSupprimer
  2. Bonsoir Dau,
    lorsque j'ai lu sur Fragrantica que cette senteur rappelait Sauvage de Christian Dior (EdP) j'ai tout compris.
    Aujourd'hui je suis allée à la rencontre du Bois d'Hadrien sous forme d'échantillon. J'ai demandé le prix de la Mandragore Pourpre (puisque Mandragore n'existe plus) et le prix m'a frappée, 145 euros! Je pensais que la demoiselle faisait une erreur mais non. La Mandragore Pourpre qui était une eau de toilette est devenue une eau de parfum (ou pas en réalité) le tout pour faire monter les prix, j'ai des réserves heureusement sinon je passerais mon chemin.
    Pour le citron noir c'est ce que je vais faire, passer mon chemin, déjà l'eau de rhubarbe me semblait moche comme tout, ce citron est hyper moche (et encore il ne plaît pas à ma mère qui meurt pour les senteurs citronnées "parce que le fond a quelque chose qui ne va pas".
    Je ne déteste pas tout ce que fait Christine Nagel mais ni ces deux eaux, ni Twilly ni, bien sûr, Sì (Armani) me tiennent au coeur.
    A très bientôt!
    Sara

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Bonjour sara,

      Oui, il y a quelque chose de Sauvage mais Sauvage est plus brouillon, les bois ambrés sont moins nets, c'est peut-être bien moins moche. (Même si la tête citron est belle.)
      Goutal Paris n'est pas una maison fréquentable, hélas. (Bien que le bois d'Hadrien ne soit pas moche à premère vue, juste totalement inutile au catalogue.
      Christine Nagel a fait de jolies choses, je le sais bien, mais je ne comprends pas cette direction. Je suppose qu'il faut survivre et vendre? (Quitte à vendre son âme au Diable?)

      Supprimer
  3. Bonjour Dau,
    "en avoir pour son argent" fait vraiment peur, associé à la maison Hermès, cela fait mal.
    Il y a peut-être d'autres jolies choses par là, il faudra chercher. Je voudrais tester le dernier Gucci (Gucci Bloom eau florale ou similaire). On dit que c'est vert, il faut je j'aille voir, et je vous tiens au courant. Sinon, je me tiens aux classiques, grosse envie de Diorella ces jours-ci.
    A très bientôt!
    Sara

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Re :-)

      Oui, en avoir pour son argent est une très vilaine expression, que je trouve bien absurde associée au parfum qui est par définition, la chose la moins palpable du monde, de l'argent qui s'envole en fumée... Je ne dirai rien de Gucci Bloom, j'ai voulu sentir, le tester était cassé. Donc, peut-être une prochaine fois. Mais je doute que ce soit aussi bien que Diorella. Vraiment...

      à bientôt

      Dau

      Supprimer

Enregistrer un commentaire