"J’aurais voulu que vous le vissiez disant cela, outrageusement poudré à son habitude, et, à son âge, musqué comme un petit-maître."
Marcel Proust, à la recherche du temps perdu, la prisonnière, 1923.
On parle peu de Profumum Roma en français et pourtant la marque italienne de luxe propose de jolies choses, qualitatives et bien exécutées, qui ne sont pas forcément mon genre, mais dont je m’étonne un peu qu’elles ne suscitent pas plus d’intérêt. Les prix sont justifiés par des concentrations de plus de 40% (ce qui fait un extrait et devient franchement compétitif.) et la créativité est celle d’une marque de niche qui décline des thèmes et des notes facilement identifiable comme c’est le cas de beaucoup (trop ?) de marques. Proposer un ambre, un patchouli, un encens, ce n’est pas, plus, très original, mais peu de marque débarquent avec des concepts totalement originaux et Profumum se débrouille plutôt bien avec de joli s
traitements des thèmes et ce côté luxueux, généreux, du bon fournisseur chez qui on prend plaisir à aller.
Soavissima est le parfum de la marque qui m’a le plus obsédé. Je ne suis pas du genre à me lancer dans des quêtes éperdues de type « je veux trouver MON poudré, le poudré parfait ! » mais si c’était le cas, Soavissima serait une possible réponse. Le meilleur résumé du parfum est « poudré. » C’est vraiment l’idée de base, la clef de sa construction. De construction, on pourrait penser qu’il n’y en a pas et qu’on s’est contenter de flaquer dans le parfum tout ce qui évoque la poudre : iris, héliotrope, aldéhydes, fleurs blanches… au hasard, en se disant que l’accumulation donnerait l’idée du nez plongé dans le poudrier, mais c’est un peu plus fin que cela. Soavissima évolue et s’il est poudré du début à la fin, il passe par des instant qui le rende différent de l’idée qu’on s’en fait en le sentant de loin en vitesse, plus intéressant et plus complexe.
Poudre et maquillage, telle est l’ambiance générale, féminine, un peu boudoir. Un peu talc pour bébé aussi, mais sans aucune innocence : le côté imposant de Soavissima lui confère une certaine extravagance qui l’installe dans une posture théâtrale qui n’a plus rien de maternel ou d’enfantin. Les aldéhydes vont par instant évoquer certains monuments de la parfumerie, on croit entrapercevoir à travers la brume les fantômes du N°22 de Chanel ou de White Linen de Lauder. Il y a un aspect gourmand aussi, dû à la vanille et à l’amande, mais garanti sans sucre, à l’ancienne. C’est là qu’il faudra évoquer un autre spectre, celui de Shalimar et de quelques anciens Guerlain, dans le sillage mêlant à la poudre fleurs, ambre et vanille. En principe, c’est là que vous comprenez pourquoi je l’aime et que vous allez en parfumerie pour le sentir…
Je suis assez partagé quand à Soavissima. D’une part, il est parfait pour rester à la maison, envelopper dans un plaid avec un livre et pour seul objectif se faire du bien dans un grand moment de douceur. D’autre part, son sillage impressionnant est fait pour arpenter les boulevards et laisser derrière soi une impression de beauté rétro, intemporelle. Poudré, mais aussi crémeux et savonneux, Soavissima rempli le cahier des charges et va un peu au-delà en offrant ce petit plus qui fait qu’on peut s’attacher à lui plutôt qu’à un autre. D’autant plus qu’on s’habitue à un certain luxe…
Soavissima, Profumum Roma, 1996.
Bonsoir, vous avez bien résumé ce parfum que j'adore . Je vous recommande dans la même marque Battitoi d'ali et aqua sale. Tenue impeccable originalité des formules et comme vous l'avez dit des parfums qui racontent des histoires. À faire découvrir absolument. Je les prefere à ceux de Frédéric Malle. Mais ce n'est que mon humble avis . Florence
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