le baril qui lave plus blanc ou le slip sale?

Ce week-end, je me suis encore énervé en écoutant quelqu’une dire qu’elle était aux anges d’avoir trouvé un parfum qui sentait bon le bébé propre, la lessive qui est pour elle la plus sexy des odeurs. Dire que je me suis énervé est excessif.  J’ai juste poussé un gros soupir et lever les yeux au ciel. Je lève souvent les yeux au ciel quand j’entends causer parfum. Je deviens un vrai spécialiste des plafonds. J’avoue que je peux comprendre que certains, jadis, trouvaient un certain érotisme à la figure de la lavandière, mais l’attrait érotique de la poudre à lessiver, de la machine à laver ou du fer à repasser m’échappe complètement. Je ne comprends définitivement rien à cette obsession du propre à partir du moment où certains trouvent ça sexy !

Au petit jeu « tu sais que t’es perfumista quand… » le rapport au propre et au sale est un bon indicateur. Si tu aimes la lessive et les muscs blancs, tu n’es pas perfumista. (En tous cas pas européen, l’Amérique du nord ou l’Asie ont un tout autre rapport avec le parfum.) Basiquement, quand on aime vraiment le parfum, qu’on le comprend un peu, on sait certaines choses, on les accepte et on en jouit. Le sale fait partie du parfum. Il y a des fractions du jasmin qui sentent la merde. C’est dit platement, mais oui, le jasmin sent vraiment les matières fécales. La fleur d’oranger, celle qui sent le produit pour bébé et la fraîcheur aux yeux des néophytes et des hygiénistes convaincus, sent par moment la viande avariée, la chair en décomposition.

Comment ne pas parler quand on aborde le sujet des classiques de toutes ces notes pas nettes, animales, qu’ils contenaient. Ce petit (parfois grand) quelque chose de sombre qui était présent sous les plus propre, caché sous la poudre et le savon, parfois, et qui contribuait à la beauté du parfum. Et à son érotisation, même si un parfum n’a pas nécessairement à être sexuel ou érotique, selon moi, en rappelant qu’il y a la peau, le corps, la bête, sous l’habit. Il m’arrive de voir dans cette obsession du propre un certain déni d’humanité. J’assume le fait que je ne suis pas un ange, que je transpire (même si je ne le cultive pas, je suis assez attaché à l’hygiène aussi), et qu’il en va de même pour tout le monde. Oui, je me plains assez régulièrement des odeurs dans les transports en commun à 7h du matin, mais il ne me viendrait jamais à l’esprit de reprocher à quelqu’un qui a travaillé dur, qui a fait du sport, d’avoir sué. Je l’accepte et ça ne me dérange pas.

Cela étant dit, je n’ai pas non plus cette envie d’aller lui lécher les aisselles, je n’ai pas ce fétichisme particulier de certains nouveaux convertis, généralement à la niche d’après 2010, qui adorent la provocation et sont tout contents de pouvoir dire qu’ils n’ont « même pas peur » de sentir la bête. Cet enthousiasme naïf est assez mignon, mais pas très fin, pas très raffiné. Cette envie de sentir le slip échappé du panier de linge sale m’échappe autant que l’érotisme du baril qui lave plus blanc. J’aime l’équilibre. Ou peut-être l’hypocrisie de la chose qui se montre subtilement sans s’afficher. C’est pour cela que j’ai illustré avec Kouros, très sale et très savonneux à la fois, qui a poussé les choses au maximum dans les années ’80, juste avant la vague propre et asexuée de la fin du siècle. Certes, cette hystérie d’avant l’effondrement est un peu trop, mais enfin, ça reste tellement plus intéressant que bien des choses plus récentes.

Et vous, sur l’échelle du sale et du propre, vous vous situer ou ?

Commentaires

  1. Bonjour
    Tout depends des circonstances mais je peux aimer les odeurs propres / sales et effectivement kouros en est une bonne illustration. J'ai découvert aussi musc Tonkin de parfum d'empire qui, dans un autre style, joue avec une note animale.

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    1. Bonjour,

      Même si ce n'est pas ma tasse de thé, Musc Tonkin est joli et bien fait et il est aussi autre chose qu'une note animale, c'est un bon exemple même si dans son coup, cet élément "sale" est très marqué. Mais de temps en temps, ça fait du bien... ;-)

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  2. Bonjour Dau.
    Ca m'agace un peu cette obsession du propre qui a complètement dépassé le stade de l'hygiène nécessaire. C'est un vrai rejet du corps et de l'organique en général, de ce qui peu mourir et disparaître (une thèse de philo a même été faite sur le sujet). Le sale c'est à la fois angoissant et fascinant, d'où ces deux positions extrêmes que vous décrivez là.
    Je balance un peu personnellement ; je ne supporte pas le très propre, mais j'arrive à apprécier certains muscs blancs quand ils sont facettés avec du poudré, du vert, ou un aspect un peu métallique. Alors que le très sale me laisse un peu de marbre maintenant. Ni choquant, ni beau.

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    1. Bonjour Mara,

      Oui, parfois, j'aime bien aussi un truc très propre, comme si j'avais besoin de me laver. Mais ce n'est ni une obsession, ni une passion et je n'en fait pas mon pain quotidien. Rien à faire, je trouve que l'entre-deux est plus intéressant, plus riche de possibilités (Le trop propre étant particulièrement stérile en plus d'être stérilisé) et plus excitant à explorer. Histoire de nuances, de jeu, tout ça kwa.

      à bientôt

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  3. Moi aussi j'aime bien quand il y a un peu de crassou en dessous... D'ailleurs je trouve Kouros très érotique. Pour l'anecdote un mec de ma promo de mastère le porte, ce qui m'a permis de le découvrir (le parfum pas le pote qui ne me fait pas d'effet :p). Et un jour il était à côté de moi, et on avait un intervenant fort choupinou, et mes ovaires se sont mises à danser la cucaracha... j'ai mis un moment à comprendre que c'était l'association des deux qui me faisaient cet effet!
    Mes les parfums trop fécaux bof, il faut du beau pour compenser la bête... même si j'aime MKK et d'autres comme Original Musk, c'est parce que les notes animales sont équilibrées par autre chose. Certaines propositions en niche me laissent perplexe!

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    1. MKK, j'aime beaucoup aussi. et il propose autre chose que juste de la bête. Je le trouve très "bijou précieux porté avec une peau de bête" moi et même si ce n'est pas mon genre, j'adore. Original Musk possède un aspect très propre au départ. Il est si rond et douillet de toute façon... Comment ne pas l'aimer? Mais pour moi, c'est surtout sur d'autre ou à l'occasion en gel douche.

      Kouros troublant, rien de surprenant, il a été fait pour ça et est très réussi dans sa fausse simplicité. (Il est plus travaillé qu'un simple accord propre/sale quand même. Pas facile à porter car très daté, pour moi, mais tellement beau et bon!

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  4. Mon cher Dau,
    Plus je vous lis, plus j'ai l'impression que vous devenez très espagnol!
    L'Espagne avait toujours été, avant l'arrivée des parfums sucrés, le pays du sent-bon, des eaux de quoi que ce soit, car il fait vraiment très chaud (climat humide ou très sec) et que les parfums français classiques, réputés susciter les pêchés, n'étaient à la portée que des gens riches ou des artistes (les riches parce qu'il se fichaient pas mal des commentaires d'autrui et les artistes parce qu'apparemment ils étaient censés pêcher 24/24 heures ;)))
    Pendant plus de 40 ans, le reste de la population se parfumait à l'eau de Cologne en journée, mais le soir... le soit c'était le jasmin et la fleur d'oranger : des senteurs charnelles, et puis la tubéreuse. Ah! Ces jeunes femmes qui sentaient la tubéreuse, si puissante, si camphrée par une chaleur étouffante !
    Le plus amusant c'est que personne ne songeait que ces fleurs blanches capiteuses, que l'on pouvait humer un peu partout, soient en relation avec le pêché qui a tant concerné les autorités morales et politiques de l'Espagne pendant plus de quatre décades.
    Grosses bises à tous!
    Sara

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    1. Bonjour Sara,

      Vu ce que vous me dites des goûts espagnols, je le prends comme un compliment. ;-) Je ne sais si je le deviens ou si je retourne à mes fondamentaux. Probablement un peu des deux. Pour parler des fleurs blanches et du péché, c'est là que c'est vraiment bon: on n'a pas l'air d'y toucher et pourtant... Voila qui rajoute du piment, lorsque nous savons et qui trouble durablement lorsque, un peu naïfs, nous les sentons en toute innocence. La fleur blanche est probablement envoyée par Satan en personne. Alors que le musc qui tache, lorsqu'il est trop perceptible, est bien innofensif avec son tatouage "vice" écrit sur le front. On le voit arriver de bien trop loin pour qu'il soit dangereux!

      Je me demanse si je suis un artiste ou si je suis riche... Probablement un peu des deux, l'artiste en moi voulant être riche et le riche voulant être un artiste!

      à bientôt

      Dau

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  5. Rebonjour à tous,
    En ce qui concerne les parfums français classiques, il y avait aussi les prix, la plupart des espagnols qui ne pouvait pas payer du Chanel 5 souhaitait en secret pouvoir s'offrir cet icône. Puis il y avait aussi Je reviens de Worth: les femmes espagnoles d'un certain âge mouillaient un mouchoir avec ce jus et le portaient (le mouchoir) entre les seins pour sentir et faire sentir l'odeur. Je reviens est le parfum le plus regretté des femmes de deux générations (celles qui ont entre 75 et 97 ans en ce moment).
    A bientôt!
    Sara

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    1. Re également.

      Figurez-vous que je ne connais "je reviens" que de nom. Bon, clairement, je n'appartient pas à sa génération. Sauf dans ma tête certains jours...

      à bientôt

      Dau

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  6. Bonjour à tous

    Le "sexy propre" et son engouement actuel , cela me laisse dubitative.
    Le propre est une sorte de '' mutisme " À quoi sent le "Rien" ?

    Pour se laver, d'accord pour un savon neutre,(rarement) et éventuellement faire un passage d'un parfum à l'autre OUI.
    Pour moi, le bébé propre sent la cire fondue (wax indonésien) et un relent de yogurt, pas le "propre".

    Me parfumer à la lessive ou aux parfums lessiviers , décidés par Unilever et consorts... Hors de question.

    Je ne supporte pas de passer dix minutes dans un rayon lessive sans avoir le nez qui gratte, éternuer vingt fois de suite. Je suis allergique aux rayons lessives de supermarché.
    C'est l'angoisse. Je dois contourner !

    J'envoies donc chéri chercher le baril nécessaire ...Pas d'adoucissant mais du vinaigre d'alcool dans lequel je fais infuser des épices et des extraits de résine selon les saisons oppoponax/ myrrhe/fève tonka / rhizome d'irisde Florence ou graines d'ambrette / cèdre de Virginie/ racine de vétiver.

    J'aime l'odeur du jasmin, de la fleur d'oranger, je me pâme pour la tubéreuse, la mousse de chêne m'est indispensable ( Je m'en fais rapporter de l'extrait des usa par un copain qui en distille "en douce" dans le fin fond du Vermont et qui prend un gros risque à voyager avec..) jJen ajoute une goutte sur ma peau avec
    Calèche , Miss Dior, Madame Rochas, qui n'en contiennent plus.
    J'aime Ubar et Gold d'Amouage Tabu de Dana ( vintage, qu'on trouve encore chez certains marchands chinois de Paris)
    L'Heure Bleue, Mitsouko ,Vol de nuit , bref ,les parfums très typés ou chyprés, pas de doudou lessivé
    Quoique le vrai doudou a une odeur de presque sale suçoté....(Je me souviens du mien)

    Je reconnais l'odeur de peau de mes ami(e)s dès qu'ils entrent chez moi, parfumés ou pas...Je sais qui a enfilé ma veste, ou essayé mon écharpe.

    Je ne peux supporter certaines odeurs de peau - au point de me dérober - même si la personne est physiquement , très séduisante et attractive de visu , c'est instinctif et incontrôlable , très difficile à gérer .
    je ne peux pas l'approcher.

    Le musc blanc à force, je ne peux plus le sentir.( dans les deux sens du terme) " j'en ai soupé"

    J'ai acheté au marché aux puces cet été un flacon boule de Je Reviens de Worth il y reste 5 millimètres de jus à la couleur très ambré;il sent encore ,la Violette, leJasmin, l'Ylang Ylang le clou de girofle la Rose,l'iris(racine)l' Ambre, l'encens ,la fève Tonka , le Vetiver, le Musk, (vrai) La mousse de chêne, le Santal, de Mysore et le baume tolu.

    Je pense que les notes de tête ont hélas disparues ,évaporées.
    j'ai aussi trouvé un flacon de Crêpe de Chine de Millot (plein).
    Il ne sent pas le propre sexy ....Lui .... il "cocotte" !!!

    À bientôt.

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  7. Bonjour Touti,

    Le rayon lessive, quel cauchemar! ça, c'est vraiment l'horreur!
    Pour l'adoucissant, je mets du vinaigre "nature" et je trouve ça très bien mais je penserai à customiser. (Ou pas, me connaissant!)

    Le musc blanc, bien utilisé, pourquoi pas? On en trouve beaucoup marié à la fleur d'oranger dans pas mal de colognes/eaux/etc et c'est parfois très réussi quand c'est bien maîtrise. (Tout le monde n'y arrive pas...)

    Cocotter, quel bonheur! Vive les cocottes, vraiment! Quel triste époque que celle où on se fait regarder de travers parce qu'on cocotte alors que c'est juste un parfum tout ce qu'il y a de plus classique et de plus bourgeois, très bon genre!

    à bientôt, d'ici là, cocottons! (Oh, ça va, je suis en Givenchy III vintage, ça passe hein!)

    Dau

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  8. mon dieu, que j'ai envie de taper quand j'entends "ça sent le propre/ le bébé", ça ne veut rien dire du tout pour moi.
    Je préfère encore entendre "ça sent la cave/ l'encens/ l'église orthodoxe" au moins ça me parle, moi qui suit accro à l'odeur des vieux livres, de la cire encaustique du savon à barbe de mon regretté grand-père et de l'eau de Colgne 4711 originale.
    Pour ma part, je me parfume avec Cool Woman de Davidoff, que j'aime beaucoup car c'est un parfum aquatique mais plus "présent" par ses notes de fond vétiver/ santal/ pêche/mûre que les parfums type l'eau d'Issey, trop léger à mon goût.
    Je me tâte d'ailleurs pour passer à la version "homme" de Cool Water

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    1. Je ne ferai pas de commentaires sur le Cool Water pour femme, je le connais à peine, tout au plus ai-je du le sentir au moment de sa sortie. Mais oui, ça sent le bébé, ça ne veut pas dire grand chose. Enfin, si une odeure muscs blancs -fleur d'oranger, probablement, associée aux senteurs des produits pour la toilette. Mais c'est très relatif aux produits utilisé, j'ai vraime,nt du mal aussi. Et un peu envie de baffer, j'avoue...

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