octobre rose

“et elle dit commençant la liste des faux serments que nous ne pouvons pas tenir:-Maman, tu seras bientôt guérie, c’est ta fille qui s’y engage. »

Marcel Proust, à la recherche du temps perdu, le côté de Guermantes, 1920.

Comme chaque année, octobre vire au rose. On passe devant les vitrines des parfumeries et on voit les offres des différentes marques, dont on se fiche un peu ou qui sont juste prétexte à s’acheter un rouge à lèvres de plus, sans culpabilité, puisque c’est pour une bonne cause, même si on se doute un peu que ça n’est pas ça qui vaincra le cancer.

Et puis, quelqu’un de proche nous apprends qu’il a un cancer. Que tout ira bien. Mais qu’il refuse l’acharnement thérapeutique et qu’on sait qu’il faut bien en finir un jour. Cette conversation qu’on croyait banale vire au cauchemar, on se sent seul et dépourvu. On essaye de rassurer, de se rassurer, mais, au fond, on ne sait pas et l’angoisse nous tord le ventre et ne nous lâchera plus.

Et puis, on passe à nouveau devant le stand Estée Lauder et on revoit les éditions spéciales "Octobre Rose" et elles prennent un sens différents. On se sent moins seul. On se dit que même si elle est dérisoire, une solidarité existe, qui fait du bien. Tout d’un coup, ce tube de rouge devient une chose très importante pour nous, qui nous redonne un peu la foi, un peu de courage. Alors, oui, c’est encore une fois octobre rose et ce serait bien que ce soit un succès, que l’opération continue, parce que les petits gestes, même juste un tube de rouge à lèvres de plus dans votre placard, ça peut vouloir dire beaucoup.