nostalgie heureuse

"Comme au temps lointain où ses parents lui avaient choisi un époux, elle avait les traits délicatement tracés par le pureté et la soumission, les joues brillantes d’une chaste espérance, d’un rêve de bonheur, même d’une innocente gaieté que les années avaient peu à peu détruits."

Marcel Proust, à la recherche du temps perdu, le côté de Guermantes, 1920.

L’œillet selon Caron est l’autre grand classique du genre, avec l’Air du Temps, qui fait partie de ces quelques parfums qu’il faut avoir sentis. Cela dit, si je possède un ancien flacon de Bellodgia, que je porte assez peu, ce n’est pas par pure curiosité intellectuelle, c’est aussi et surtout parce que j’ai beaucoup d’affection pour lui.

Bellodgia est épicé et floral, évoquant des œillets mêlés de roses, mais ce qui fait son charme, c’est une base crémeuse et cosmétique, très enveloppante et tout en douceur. L’ensemble est dense, saturé, riche, presque lourd, et pourrait être étouffant. Bellodgia ne sent pas la garçonne, il sent la grand-mère poudrée. Le parfum est vieilli, rétro, ce qui le rend difficile à porter, même pour moi qui n’ai pas peur de paraître 110 ans d’habitude, mais c’est un vrai bonheur de le sentir, de le respirer et, éventuellement, de le porter un peu à l’occasion.

C’est un parfum aimant et enveloppant, rassurant, parce qu’il parle de jours heureux, exactement comme une grand -mère adorée. Il est vieilli, mais il ne semble pas parler de son âge, il raconte des souvenirs plaisants et joyeux. Qui a dit que la nostalgie était nécessairement triste ? À travers ses rides, on distingue encore cet optimisme heureux qui était en lui et qu’il n’a pas perdu. 

Bellodgia, Ernest Daltroff pour Caron, 1927.

NB: les reformulations obligent à parler de lui au passé, comme c'est le cas pour l'air du temps...

Commentaires

  1. C'est une amusante coïncidence que vous parliez de la note oeillet, cette dernière m'est apparue très vivement dans Sous le vent que je portais hier. Généralement ce sont les notes vertes que mon odorat perçoit en premier dans cette fragrance, mais pas cette fois. J'aime beaucoup l'oeillet de Bellodgia, surtout le PdT, et dans L'Air du temps (vintage) et je n'avais jamais porté attention à cette note dans le Guerlain qui là me semble très évidente. Vous auriez d'autres exemples d'oeillet jouant à cache-cache?

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    1. C'est assez évident, mais l'oeillet est très présent dans l'Heure Bleue et Opium. Personnellement, je l'aime énormément dans le bouquet aldéhyde de Soir de Paris de Bourjois. Tout cela en vintage bien sûr... Il n'est pas tellement caché, mais il n'est pas vraiment en mono-note non plus... ça le rend plus intéressant.

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    2. Bonsoir Dau.
      Bellodgia ... C'est à trois ans le dressing de mon arrière grand mère Une immersion unique ,j'ouvrais la penderie et me glissais entre les manteaux ,j'y restais des heures ,cachée, enivrée d'oeillet chiffonné et poivré ,de santal et cette pointe de girofle poudrée de vanille ce patchouli secret.
      Elle mettait dans chacun de ses sacs un mouchoir brodé et parfumé, Un Rituel. Il me reste un haut à courroies de voyage ,et quel voyage ...Quand je l'ouvre, j'ai à nouveau trois ans.
      Le cuir a retenu intacte ,l'âme même de Bellodgia......Inoubliable Je ne le porte pas Je le flaire ,au goulot de nombreux flacons multi-facettes de Lalique retrouvés ,que je garde précieusement...Chaque fois c'est ce le retour fulgurant du passé qui me happe.Je ne connais pas la nouvelle version,...je n'ose pas....ce serait, là, comme un sacrilège., Plus tard peut être....C'était SA signature ...Un seul parfum Bellodgia ... Hormis Canoé l'énorme flacon à bouchon blanc comme un haut calot de marin us, réservé aux frictions les jours de fièvre, et au bain....

      Aujourd'hui pour moi c'est Calèche (vintage)

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