"petit coquillage de pâtisserie, si grassement sensuel"
Marcel Proust, à la recherche du temps perdu, du côté de chez Swann, 1913.
Si Divin Enfant est une incarnation, c’est à mes yeux celle
de l’ambiguïté de la marque qui le lance : État Libre d’Orange prétend
bousculer les code, être le rebelle du parfum et, sous des noms choquants, propose
des parfums somme toute fort classiques et assez joliment exécutés. (Mettons de
côté Sécrétions Magnifiques, le parfum alibi de la marque.) Dans ma bouche, il
va de soi que classique est loin d’être péjoratif. Le marketing est parfait,
qui donne une impression de contre-culture hype sans rebuter par ses jus ceux
qui se veulent à la mode.
Divin Enfant est une fleur d’oranger tirée vers la guimauve
qui aurait, soi-disant, un côté sulfureux, l’innocence de l’enfant évoquer par
la fleur-bonbon étant suggérée par un fond sensuel. On ne nous ressort pas le
discours freudien décrivant l’enfant comme un pervers polymorphe, mais pas loin…
Sauf que oui, mais non. Divin enfant est un gourmand. Point barre. Un gourmand
bien fait, certes, mais un de ces nombreux parfums à la mode, qui ratisse large pour
plaire à un public le plus vaste possible. Rien de honteux là-dedans, mais
cessons d’invoquer des concepts fumeux pour jeter un voile pudique sur une
ambition commerciale. Ça donne vaguement l'impression que la marque à honte, alors qu'il n'y a pas de raison d'avoir honte dans ce cas précis.
Moi qui ne suis pas un amateur de gourmand, je ressens
surtout un vague écœurement face à la confiserie d’un parfum tenace, semblable
à celui que j’éprouve lorsqu’on me propose ces desserts orientaux, dégoulinants
de miel, qui me restent toujours sur l’estomac…
Divin Enfant, Antoine Lie pour État Libre d’Orange, 2006.
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