5.0

« Ce fut à M. de Charlus lui-même qu’elle adressa un long regard plein de reproches. Elle avait l’air de lui faire grief d’être avec elle, dehors, dans une attitude aussi peu usuelle que s’il fut sorti sans cravate ou sans souliers. »

Marcel Proust, à la recherche du temps perdu, le temps retrouvé, 1927.

N°5, Chanel
L’eau de parfum N°5 est sortie dans les années ’80 et était très marquée par cette période : moins aldéhydée, un fond dopé par un (vilain) patchouli vanillé qui en faisait un parfum très marqué par son époque mais pas du tout N°5. Je ne pouvais la supporter alors que je faisais mes délices de l'eau de toilette et, plus tard, de l'extrait. Il semble que Chanel ait changé la formule et l’actuelle version, est beaucoup plus proche du 5 original, jouant sur les aldéhydes et l’aspect floral pour un effet poudreux savonneux plus dans l’esprit du classique.

Cette Eau de Parfum actuelle sent bon la peau propre, fidèle en cela à Gabrielle Chanel qui avait voulu un parfum qui sente le savon, qui sente le propre. Mais un parfum de peau ? Car l’eau de parfum n’est rien d’autre qu’un parfum de peau à la diffusion réduite, on ne peut parler de sillage, et à la tenue ridicule… Or, le N°5 était un parfum qui s’imposait. Le pire, c’est encore cette réduction des accords…

Disparu le nimbe doré des aldéhydes, les aspects floraux riches et le fond un peu sale. Là ou Gabrielle imposait un parfum puissant, triomphant, victorieux et exigeant, on ne trouve plus qu’un parfum approprié au bureau, qui ne fait pas de vague, ne se fait pas sentir et qui n’indique rien d’autre que la fille propre et soignée. L’eau de toilette que j’ai connue il y a 30 ans avait plus de chien, plus de présence.  (L’actuelle est pour le moins évanescente.) L’extrait lui-même a bien changé. Bref, je ne reconnais plus ce 5 que j'ai aimé. Marilyn ne le reconnaîtrait point non plus. Quant à Gabrielle...

Quoi qu’en dise la rue Cambon.  Qui prétend que le N°5 est toujours le N°5 en dépit des législations et de ce que sentent les clients. Pourtant, il y a des beaux restes chez Chanel, dans les jolis exclusifs. Le 22, Bois des Îles, Cuir de Russie, sont toujours des petites merveilles. Comme quoi, on peut s’adapter et rester beaux. D’autres marques l’ont amplement démontré. (On pense évidemment à Mitsouko !) Et chez d’autres, même si on bâcle un peu , beaucoup, On reconnaît à demi-mots en s’abritant derrière l’IFRA que les choses ont un peu changé, que pas le choix, etc.

La maison Chanel fait le choix de la langue de bois et nous prend pour des cons en nous jurant que c’est identique, que c’est notre nez qui… Au pire, il y aurait des variations dues aux précieux composants naturels qui changeraient d’une récolte à l’autre. Sauf qu’on parle bien de la présence des aldéhydes de synthèse qui faisaient en grande partie le charme du N°5, pas de la qualité du jasmin. Non, le 5 est bel et bien modernisé : lifting et amaigrissement. C’est plus actuel et, aussi, moins cher. Parce que le 22 démontre que c’est possible de rester beau. Mais ça, c’est pour les exclusifs, n’est-ce pas ? Pour les clients des boutiques Chanel. Vous qui achetez du parfum dans votre parfumerie de quartier, pire, au duty free de l’aéroport, vous n’avez pas droit à la même qualité, parce que vous n’êtes pas vraiment des clients Chanel… Dans le fond, même si on est bien content que vous fassiez vivre la société, on vous méprise. Et, là, vraiment, j’ai du mal.

Commentaires

  1. Fautes de grammaire au premier paragraphe : que je "faisaiS", quatrième paragraphe : "on reconnaiT", et dernier paragraphe : "vous qui acheteZ".
    Si Monsieur Proust vous lisait... :)

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    1. J'espère qu'il me plaindrait un peu de devoir me battre avec le correcteur de l'iPad et je compterais sur son extrême gentillesse. (J'écris principalement dans les transports en commun et ce n'est pas toujours facile.)

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  2. Bonjour Dau,
    Je ne connais que le Chanel N5 moderne et je dois donc faire confiance à tous ceux qui ont utilisé le Chanel 5 au fil des ans et ne reconnaissent plus leur parfum. En tout cas je suis avec vous qui vous indignez de n'avoir pas le droit à la même qualité dans le mainstream et dans les collections exclusives. Serait-ce une simple question de prix ou une façon d'exclure tous ceux qui n'achètent pas des collections à la boutique en leur proposant des produits de médiocre qualité?
    Cordialement,
    Sara

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    1. Je ne sais vraiment pas ce qu'il en est. Mais je constate que certains réussissent à maintenir des parfums de qualité sans hausse de prix spectaculaire et que d'autres ne le font pas. Il y a peut-être tout simplement bâclage et paresse dans les reformulations? Je crois aussi qu'il y a une volonté de moderniser pour rester dans la course, ce qui expliquerait que l'extrait du N°5 soit un joli jasmin (cher pourtant) plus qu'un grand floral aldéhydé. Pour les versions edp, edt, j'avoue ne pas comprendre, ne pas voir d'explication rationnelle.

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  3. Cher Dau,
    Personnellement, je ne connais que la version actuelle du N° 5 edp, l'ancienne version je ne l'ai pas connue et c'est de celle-ci que je voudrais vous parler. Dans l'edp, j'aime son côté poudré mais je reconnais tout comme vous, que ce n'est pas un parfum à sillage, encore moins entêtant, et personnellement, depuis près de 2 ans que je le porte, ce parfum ne m'indispose pas, je sent bon, point...
    Lorsque je veux que des collègues me disent ce qu'elles en pensent, il faut que ces personnes qui veulent me sentir, mettent leur nez dans mon coup pour le sentir, c'est vrai qu'il ne "porte" pas, je n'ose imaginer l'edt.
    Mon message n'est pas une critique vis-à-vis du N° 5 edp, n'ayant pas connu l'ancienne version, mais sur le plan personnel, j'aime son côté poudré et j'ai beaucoup de mal à en changer.
    Sauf hier, où j'ai voulu essayer un échantillon de Souffle de parfum de Shalimar : celui-ci aussi à un côté "poudré", un peu "vieillot" m'a dit une amie, mais j'avoue qu'en fin de journée, j'arrivais encore à sentir ses effluves, chose impossible en fin de journée avec le N° 5, à moins de s'en remettre entre midi et deux. Enfin et concernant le N° 5, je me demande si la véritable Rose de Mai rentre dans son élaboration car vu le nombre de flacons qui se vendent dans le Monde chaque année, je ne suis pas sûre qu'il y est assez de récoltes pour satisfaire la demande...
    Cordialement
    Vanderbilt

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    1. Je ne vais pas aider beaucoup, car je ne connais pas Shalimar en version souffle. (J'ai du retard à rattraper) Pour le rose de mai, je ne sais pas, j'ignore tout de la production de rose quelle que soit la variété.Pour Chanel, méfiance quand la marque communique sur les matière, elle parle uniquement de l'extrait. Pour le jasmin de Grasse, dont elle se vente allègrement, il n'est utilisé que pour celui-ci et pas pour les autres versions... c'est un peu hypocrite comme démarche, mais bon, globalement, la qualité reste bonne dans toute les versions. À priori, à l'heure actuelle, c'est l'edp qui aurait aussi ma préférence. Mais les modifications continuelles m'épuise bien trop chez Chanel. (Le N°5 serait revu tous les deux ans m'a-t'on murmuré ce week-end.) Qu'il faille se pencher et mettre le nez dans votre coup aujourd'hui ne me surprend pas le moins du monde... L'edt, différente dans le rendu n'avait pas une maigre tenue et une maigre portée jadis, ce serait à tester. Et la version Eau Première, qu'en penser vous? (Elle a changé il y a peu.) Pour ma part, je trouvais qu'elle était vraiment agréable. Elle me semble plus poudrée qu'à ses début, peut-être une piste pour une variation?
      D

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    2. Bonsoir,
      Ah, j'avais donc raison de penser que Chanel ne pouvait pas utiliser la rose de mai pour le N° 5 et ce pour toutes les versions, EDT, EDP mais exclusivement pour l'extrait. Dorénavant je me méfierai donc et j'arrêterai de croire tout ce que je peux lire ou écouter sur le marketing Chanel. J'enregistre donc que c'est à destination exclusivement de l'extrait. Pas plus tard qu'avant hier, je disais à une vendeuse en parfumerie que je trouvais que le N° 5 n'était pas un parfum à sillage (elle était pourtant pas toute jeune), et elle m'a dit que mes propos l'étonnée...
      Ceci dit, n'ayant pas connu les anciennes moutures, je trouve que la fragrance est plutôt pas mal, mais je dois m'en remettre entre midi et deux, et d'ailleurs, je me demande si je ne vais pas m'acheter dans la ligne, le parfum pour les cheveux.
      Depuis quelque temps, je ne sais pas ce qu'il m'arrive, mais le N° 5 est le seul parfum que j'arrive à supporter en journée, il ne m'entête pas. Je voudrais comme vous et d'autres passer à autre chose mais je n'y arrive pas, en fait, j'ai de plus en plus de mal à supporter un nouveau parfum.
      Concernant l'Eau Première, je trouve que celle-ci se rapproche beaucoup du N° 5 et je la trouve également très poudrée, je trouve cette Eau Première agréable à porter.
      Quant à Souffle de Shalimar, ce ne sera pas un futur achat, j'ai voulu le porter en journée, je le trouve entêtant. Pour info, il n'a rien à voir avec le Shalimar "basic".
      Cordialement : Vanderbilt

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    3. Oui, la fragrance à de beau reste. Pour la brume pour cheveux: tester avant, ce n'est pas la même odeur exactement (tout N°5 est constitué de variantes d'une version à l'autre.) donc il faut voir ce que ça donne. Sinon, il y a toute une ligne corps lait et crème qui est bien en terme de tenue du parfum.

      Pour Shalimar: Aucun flanker n'a de rapport avec l'original, ou alors très lointain, très très, et tous se plantent... Mais pourquoi le marketing insiste? Certains parfums comme le Shalimar Initial, très beau, auraient pu faire une très belle carrière sans ce handicap de l'étiquette Shalimar qui rebute ceux qui n'aiment pas Shalimar et déçoit ceux qui l'aime...

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