royal œillet, oriza l.legrand

 


Si l’Œillet Louis XV n’était pas vraiment un œillet mais une évocation de la vie d’une cour aux perruques poudrée, le Royal Œillet d’Oriza est beaucoup plus fidèle à la fleur. Point de naturalisme, de parfum paysager, l’historicisme est toujours présent et le parfum demeure bel et bien daté. (C’est bien pour cela que nous fréquentons et aimons cette maison.) C’est d’emblée à L’Air du Temps que j’ai pensé en respirant son sillage. Il y a pire comme référence.

 



Le départ de Royal Œillet me désarçonne. Géranium ? Je ne sais vraiment pourquoi je butte dessus, ce n’est ni moche, ni inharmonieux. Mais les trente premières secondes sont toujours étranges pour moi jusqu’à ce que le parfum se fasse floral, résolument œillet et indubitablement solaire. C’est en cela qu’il m’évoque l’Air du Temps, mais l’œillet est ici plus potelé et plus mur. Il perd en élégance et en grâce mais gagne en maturité et en sensualité. L’ingénue a muri, pris trois kilos et découvert les joies du sexe en compagnie de celui qui n’est peut-être pas son époux.

 



Très old fashioned, le parfum sent bon les heures glorieuses de la parfumerie luxueuse, les années ’50 où les jupes corolles rappelaient les tournures et les paniers. Cette grâce rétro plus que dépassée est défunte et le fond épicé poudré, quelque peu poussiéreux le souligne bien. Si c’était un roman, il n’aurait pas reçu le Goncourt et n’aurait pas fait entrer son auteur dans la Pléiade, mais je gage que ses lecteurs, amateurs d’eau de rose seraient comblés par un texte à la sentimentalité dignement désenchantée. 

 



Plus proche de nous, plus premier degré, je l’aime beaucoup mais le trouve plus difficile à porter que le Louis XV. C’est très personnel : j’ai plus de facilité avec les vintages ou les esthétiques anciennes (spécialité de la maison) à porter quelque chose de très éloigné de moi, que quelque chose de plus proche. Il y a un inconfort à jouer un rôle qui est moi mais pas tout à fait, alors que me glisser dans un personnage qui n’est pas du tout le mien n’est que pur plaisir. (Ok, les soieries et la poudre, c’est totalement moi, mais vous avez compris l’idée, non ?)




Royal Oeillet, Hugo Lambert pour Oriza L.Legrand, 2014.


NB: dans six mois, les trente premières secondes seront probablement mon passage préféré.

Commentaires

  1. Oeillet, violette, lilas: il serait intéressant que les nez nous proposent ces parfums dans des versions actualisées sans tomber dans la sucraille ni un final en explosion de bois ambrés... Je les imagine très verts, insolents et faussement simples. Ces senteurs ont été des incontournables durant des décennies, voire des siècles, non sans raison. Il est amusant de voir que la rose est toujours travaillée mais pas ces trois classiques (un peu la violette mais souvent noyée dans les fruits rouges et la vanille).

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    1. C'est très dur de capturer l'odeur du lilas. #VousSachiez

      -fabien-

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    2. L'oeillet, c'est très difficile avec les restriction sur l'eugénol... Il y a eu un revival au début du siècle mais le public n'a pas vraiment suivit. (Cantonné à la niche à l'exception peut-être de l'infusion de Prada.) La violette, les gens l'associe immédiatement avec le bonbon et recherche ça, ce qui est désolant car ça peut-être tellement plus poétique et joli, voire d'une élégance folle quand on pense au 1000 de Patou et à sa feuille de violette si chic.(Il reste pourtant la violette cosmétique, très lipstick qui plaît plutôt bien!) Quant aux lilas, je crois que c'est mort encore pour un bout de temps, même si je trouve ça fort joli mais on l'a un peu trop senti en parfumerie fonctionnelle et pour beaucoup qu'ils soit blancs ou mauves, ils sentent le désodorisant pour les toilettes de grand-mère. Bref... On n'est pas sortis des ronces et le retour à la joliesse n'est pas pour tout de suite, hélas...

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  2. Bonjour Dau,
    ce merveilleux oeillet, j'ai la chance de l'avoir. Néanmoins, j'ai mis du temps à me décider, plusieurs pschitt de l'échantillon furent nécessaires. Je n'imaginais pas le porter à l'extérieur, il est si spécial, désuet..., ce qui en fait pour moi une qualité primordiale normalement, mais là je m'étais un peu reniée... et puis à un moment ce fût évident, j'ai balayé ces ridicules réticences et l'ai acheté. Oui il sent la vieille, mais moi j'adore, surtout quand c'est bien fait et là ça l´est superbement. J'aime beaucoup ce départ très poivré qui se décline en un merveilleux bouquet suranné par la suite... Je trouve que l'odeur est vraiment, vraiment différent l'été!! L'hiver, l'aspect poivre, un peu rêche ressort beaucoup plus, le bouquet qui s'en suit est beaucoup plus poudré et distingué...Sous une chaleur de plomb (Provence sèche et aride...), le poivre fait une apparition très furtive et laisse place à ce que je ressens comme un bouquet d'oeillet "écrasé", la poudre est moins présente, c'est à peine "talqué". J'aime beaucoup aussi! Mais pour moi, selon la saison, l'effluve est différente. (je perçois ce même écart avec l'oeillet Louis xv..., qui à part l'oeillet dans le titre, sont très dissemblables) Délicieux, quelque soit la saison, je l'apprécie beaucoup en lisant Jane Austen, il m'accompagne très bien dans ce romantisme élégant.
    Barbara (discussions Oriza...)

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    1. Nous sommes ici sur un blog de parfum, et force est de constater qu'à chaque billet de parfum, nous nous déchaînons comme des folles, merci Dominique ! Et fun fact : j'ai acheté aujourd'hui cet œillet sur le site de la Maison Oriza pour pouvoir rajouter un post ici quand je le recevrai.... patience donc.

      -fabien-

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    2. Oh, non, IMPATIENCE ! (Oui, nous sommes une bande de petites sottes!)

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    3. Bonjour Barbara,
      Mais oui, cet œillet est très réussi dans le genre propre à la maison (qu'on adore) et l'évolution, c'est vraiment un énorme bonus... J'ai tourné autour du Royal pendant des années, me disant que oui mais non puis finalement oui mais, avant de craquer. Donc je comprends fort bien que plusieurs essais sont nécessaires. D'ailleurs, il est plus agréable à porter qu'à sentir sur touche, sur le poignet ou sur d'autre personne selon moi. Plus confortable qu'on ne l'imagine. (Et je n'ai pas vraiment eu l'occasion de tester par forte chaleur, ça viendra, mais j'aime beaucoup son aspect très solaire mais pas "exotique" pour autant.)
      Beaucoup de bonheur avec lui!

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  3. Coucou mes petites sottes !
    Me revoilà ! (Oh non pas lui, je vous entends d'ici)
    J'ai reçu ma commande Oriza et rhâââ cet œillet est-il aussi royal qu'il en paraît ?

    De prime abord, oui, indubitablement. Pas de doutes ainsi c'est sans doute une fuite (vous aviez reconnu les paroles de Mylène ou pas ?) l'œillet est là, et il est bien là, ses petits pétales roses lui vont à ravir et puis oh mais, que se passe-t-il ? Est-ce la chaleur écrasante du sud de la France qui le transforme en qqs minutes en une vieille rose ancienne très mémère ? Est-ce moi qui fait virer le parfum (impossible, je ne suis pas roux!) ah ben oui, oui c'est bien une bonne grosse rosse ancienne très mémère qui vient là, cachée derrière un bosquet elle a attendu son tour cette garce mais oh, tu sens bon toi la rose, tu t'appelles comment ? Oh tu repars déjà ?
    Mais ah ben revoilà l'œillet qui reprend le dessus, son piquant très girofle/géranium qui fait des siennes, mais presque plus modern d'un seul coup moins gnangnan même si on adore le gnangnantisme en parfumerie, là d'un coup d'un seul il est plus doux, plus rond, il a mis une petite écharpe de benjoin ou de santal je ne sais pas trop, mais il se fout de nous le coquin, il est schizo ou quoi? Non mais ce parfum est génial en fait ! Il va, il vient au creux de mes reins et je me...... retiens....
    Il sent la soie, il sent la soie neuve, presque avec une pointe de nettoyant à l'ancienne type recette de grand-mère....il est topissime, déroutant et charnel à la fois.
    Bémol : il ne tient pas si longtemps que ça.
    Pas grave ! Je repschitt !!!!!

    -fabien-

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    1. Ahhhhhhhh des retours dans la chaleur (je suis si mal placé pour juger de la chaleur et des parfums moi qui ai tout le temps froid) ... Oui, oui, il a l'air bien plus moderne que beaucoup des créations de la maison mais sans le côté péjoratif que peut avoir le mot moderne dans notre bouche. Je ne dirais pas génial, mais il dit fort joliment quelque chose et surtout, il est délicieux à porter, c'est une redécouverte à chaque fois. (Et être délicieux à porter, c'est mieux que d'être "une OEUVRE" (je trouve les œuvres souvent très creuses et chiantes à force d'être prétentieuses et de se prendre au sérieux. Mais CHUT!)

      Enjoy mon coquin!

      NB: sur moi il évolue lentement mais tient longtemps. Peut-être la chaleur?

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