coupable

« Peut-être avait-elle obscurément senti que mon jeu avait un autre objet que celui que j’avais avoué… »

Marcel Proust, à la recherche du temps perdu, à l’ombre des jeunes filles en fleurs, 1919.

Ce billet n’est pas celui qui était prévu. Non pas que je sois une personne organisée qui planifie les billets pour le blog, disons plutôt qu’il résulte d’une surprise venant d’un parfum dont je n’attendais à vrai dire pas grand-chose. Mais j’aime vraiment beaucoup Encens Mythique d’Orient et, visiblement, il en va de même pour beaucoup car ce parfum se révèle un piège à compliments. Et j’ai beau me parfumer pour moi, j’avoue que je ne déteste pas être flatté et qu’il m’est de toute manière toujours très agréable de voir l’un de mes engouements partagé.

A priori, je sais que c’est bête d’avoir un a priori mais vu le nombre de sorties, on trie comme on peut, ce n’était pas un parfum qui m’intéressait le moins du monde. Cette ligne «les déserts d’orient» ça fait quand même très pupute à la recherche de pétrodollars. Je ne jette pas la pierre à Guerlain, il faut faire tourner la boutique et dans mon travail, je ne fais pas non plus que ce qui me plaît ou que ce que je trouve bien. Simplement, des parfums à destination des orientaux, ça n’allait pas être ma tasse de thé bien qu’ayant senti le oud Songe d’un Bois d’Été, je l’avais trouvé fort beau et l’avait même offert, n’ayant pas envie de le porter. Cela dit, je lui ai quand même trouvé un défaut majeur: il m’empêchait d’avoir le plus beau sillage de l’assemblée un peu trop souvent !

Quelle ne fut pas ma surprise lorsque le Père Noël déposa dans mes blanches mains un flacon d’Encens. Je me suis demandé si le dit Père Noël me connaissait bien, mais l’histoire prouve qu’il me connaît bien mieux que je ne le crois. Et surtout, quelle surprise en sentant cet encens qui n’en est pas un. Des aldéhydes m’ont sauté au nez! Joie & Bonheur ! D’abord un peu métalliques puis se faisant douceur crémeuse, savonneuse et poudrée, pour accompagner la note principale qui n’est pas un encens mais une rose. Une magnifique rose classique, à l’ancienne, qui m’a évoqué celle de Madame Rochas (L’un de mes parfum préférés au monde, celui qui m’a fait aimer la rose.) dans sa version parfum de toilette, plus abstraite fondue, que l’eau de toilette, aussi jolie mais plus nettement rose de jardin. L’encens vient jouer avec la rose, la souligner l’emmenant sur un fond boisé ambré enveloppant comme Guerlain sait si bien les faire. (J’ai bien dit bois et ambre, PAS bois ambrés !) 

C’est un parfum très Guerlain, comme les classique de la maison, il est enveloppant, flatteur, avec beaucoup de sillage et de présence. Il est séduisant, mais d’une manière confortable, sans être imposant, hautain ou dominateur comme il aurait pu l’être dans d’autres maisons. Et puis surtout, c’est un parfum très parisien. Il emploie peut-être des matières susceptibles de plaire aux orientaux, mais il ne les traite pas « à l’orientale » comme une parodie un peu vulgaire, un peu grotesque. Il est vraiment d’un chic traditionnel, tout ce qu’il y a de plus français, très classique dans son évolution qui est extrêmement fluide contrairement à beaucoup de parfums modernes qui se croient obligés de marquer les transitions pour que le public les comprenne et se pense spécialiste. Mais moi, je ne veux pas être un spécialiste, je veux être séduit. Merci Guerlain d’avoir compris ça !

Résultat, je développe assez rapidement une addiction à ce parfum. Je le porte et, surtout, je n’arrête pas d’aller le sentir, de repasser par les pièces où je l’ai vaporisé pour humer sa trace. Ce n’est pas exactement mon genre, je suis en réalité un peu plus attiré par la raideur, à l’aise dans des parfums plus «frigide.» Mais c’est un plaisir coupable que d’être autre un instant. (Quoique pas vraiment puisque je me suis beaucoup vautré dans l’Heure Bleue qui n’est pas exactement hautaine non plus et présente le même genre d’orientalisme chaleureux en fond.) Et parfois, les plaisirs coupables sont les meilleurs…

Encens Mythique d’Orient, Thierry Wasser pour la collection Déserts d’Orient, Guerlain, 2012.

Commentaires

  1. Je n'aime pas les parfums à la rose ni à l'encens, mais ton billet me donne une furieuse envie de le sentir !

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    1. Tu dirais probablement que c'est très moi. Quoique pas tant que ça...

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  2. Bonsoir Dau,

    Cet Encens Mythique d’Orient, dont je doutais aussi,
    m'a joué un sacré tour. Je suis conquise par ses/ces accords.

    C'est fait il m'a séduite.

    Vu le niveau du nectar sur votre photo, nous en sommes au même point.

    Le père Noël a eu du flair cette année.

    Ma moue dubitative du début s'est muée en sourire confortable
    Quelle séductrice cette rose, avec ce bois,cet ambre
    Je suis assez peu "rose" d'habitude, mais là...Bravo !

    HURRAH à Thierry Wasser et Guerlain.
    C'est vraiment une réussite.

    Si nous devions en "stocker" deux ou trois, comme à l'accoutumée.... Je crains le pire .....

    Bon dimanche.

    Touti

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    1. Bonjour Touti,

      JE suis content de ne pas être seul sur ce coup-là! Personellement, je trouve que c'est merveilleux de se faire avoir comme ça! ça prouve qu'on n'est pas d'irréductibles vieux cyniques toujours p^rêts à râler et à détester mais qu'on peut se faire avoir encore et encore. Oui, vraiment Bravo à la marque et au nez!

      Stocker? Bonne idée, mais ça devient un peu cher là! (Oui, le seul défaut de ce parfum, c'est d'être un exclusif un peu hors de prix. JE sais que quand on aime on ne compte pas, hélas, d'autes se chargent de compter pour moi. (Vilain banquier qui n'y comprend rien!)

      Bonne semaine!

      Dau

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