café gourmand

“Les gâteaux que je prenais sans m’en apercevoir, il viendrait un moment où il faudrait les digérer.”

Marcel Proust, à la recherche du temps perdu, à l’ombre des jeunes filles en fleurs, 1919.
Il y a une tradition gourmande chez l’Artisan Parfumeur. D’ailleurs, l’étendard de la marque reste envers et contre tout Mure et Musc. Mais je pensais plutôt au goûter chic Tea for Two d’Olivia Giacobetti qui marie joliment épices et thé fumé qui propose sa petite dose de sucre sans écœurer. Noir Exquis remet le couvert en quelque sorte, même si le goûter est devenu un café gourmand.

Du café, donc. Une odeur que j’adore alors que je suis incapable d’en boire, étant depuis toujours au thé dont je ne prise guère l’odeur. (Allez comprendre.) Plus net que dans Black Opium qui le revendiquait chez lui. Plutôt du café qu’on moud d’ailleurs, mais c’est à ce moment-là qu’il est le plus délicieux. Et des pralines : manons et marrons glacés. Une pointe de sirop d’érable. Une ambiance pâtisserie dans l’après-midi, le cliché de la petite dame s’offrant une petite douceur, une petite tromperie au régime. Noir Exquis est plaisant, dans l’air du temps, pas caricatural, bien que le propos manque un peu de finesse, et il est relativement distinctif dans l’océan des gourmands.

Est-ce que c’est joli ? Oui. Est-ce que c’est portable ? Sans doute, oui, un jour à l’occasion, mais je n’imagine pas qu’on en fasse son quotidien. J’aime beaucoup les marrons glacés, mais  je n’en mange qu’un à la fois, au bout du deuxième, je suis écœuré ; Noir Exquis est du même ordre, un petit plaisir qui devrait rester exceptionnel. Et puis, surtout, Noir exquis évoque plus le parfum d’ambiance, il aurait été irrésistible en bougie pour transformer une maison un peu triste un après-midi d’automne pluvieux en palais du cupcake. En parfum de peau, il est charmant le temps d’un échantillon, guère plus à mon avis, mais nous ne sommes plus au temps de la fidélité à un parfum, n’est-ce pas ?
(Pour ça, il vous restera toujours l’Heure Bleue ou Calèche…)

Noir Exquis, Bertrand Duchaufour pour l’Artisan Parfumeur, 2015.


Commentaires

  1. Bon après-midi Dau,
    Je me rends compte que je vous rejoins sur pas mal de points, l'odeur du café au moment où l'on moud (à la maison c'est moi qui le mouds) me semble délicieuse et pourtant je ne bois quasiment pas de café (dans des petits bistrots choisis, un café noir de temps à autre...). Je suis une femme qui boit du thé (rouge et noir au petit déjeuner, vert et blanc dès le début de l'après-midi), et qui aime beaucoup l'odeur du thé, à la bergamote avec une pointe de crème (Earl Grey Crema de chez Teashop.es) et encore de la même maison l'Oolong Milky Blue, du thé bleu également à la crème (dont l'odeur me semble exquise et je ne supporte pas le goût).
    En ce qui concerne Noir Exquis, je dois confesser que je ne vais pas succomber à la tentation, peut être un échantillon mais pas davantage. Je vous rejoins aussi sur les macarons, moi aussi j'en mange un puis c'est fini. En revenant à ce nouveau jus, je suis sûre et certaine que ce n'est pas dégoûtant comme Black Opium (qui me soulève l'estomac), qu'il s'agit bien d'autre chose et pourtant il ne m'intéresse guère.
    La fidélité au parfum n'existe plus de nos jours et je vous rejoins encore une fois sur votre avis : si on devait rester fidèle à une senteur il devrait s’agir d’un bel iris, d’un Chypre vert, d’une odeur classique un peu altière ou d’un cuir duveteux.
    Très cordialement,
    Sara

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    1. Bonjour Sara,

      Je dois dire que je suis toujours surpris face à ces gens qui découvrent avec bonheur qu'on peut sentir ce qu'on mange et qui recherchent ça avec passion... Il est vrai que j'aime surtout le salé et que je me vois mal demander à la parfumerie une odeur de saucisson, de pot-au-feu, ou , plus raffiné, de cuisses de grenouilles à l'ail... Mais enfin, pour moi le sucré ne vaut guère mieux et je ne vois pas vraiment l'intérêt de sentir comme on mange. Ou comme on boit! Mais enfin, avec les parfums au thé, je surmonte peu à peu ma réticence instinctive en constatant que l'odeur stylisée que les parfumeur appelle thé n'a pas grand chose à voir avec l'odeur réelle de la boisson que j'adore, mais dont je n'aime pas vraiment l'odeur....

      Black Opium me soulève le coeur à moi aussi. D'ailleurs, j'y sens fort peu le café, tant tout dans ce parfum s'englue dans une espèce de mélasse sucrée absolument affreuse.

      Oui, la fidélité, ce serait pour une belle senteur classique, assez complexe et changeante pour ne pas nous lasser, et capable de s'adapter au différentes saisons et aux différents aléas de la vie. Un chypré vert, ce serait l'idéal pour moi. (Avec une jolie pincée d'aldéhydes quand même.)

      Mais je suis certain qu'on pourrait réfléchir des heures sur la question à peu près chaque jour sans trouver de solution définitive....

      à bientôt

      D

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