sauvage

 


Depuis les années ’60, la fougère est l’increvable archétype du parfum viril avec ses notes fraîches posées sur un fond plus capiteux qui évoquent le savon à barbe d’une façon un peu brutale et caricaturale qu peut avoir son charme. Depuis le Brut de Fabergé, le genre n’en finit pas de renaître alors qu’on le croit volontiers enterré. Après les succès Azzaro pour homme le macho, Drakkar Noir le cadre à la salle de sport, on se disait que c’était enfin fini mais c’était sans compter sur le retour en grâce via le second degré du Mâle de JPG.

Aujourd’hui rendons hommage (ou vouons aux gémonies) à Paco Rabanne qui avec son Invictus à amorcer le retour du genre, que nous n’espérions pas tous. Chanel a suivi avec son Bleu, prétendant appliquer sa méthode habituelle « on fait pareil mais en mieux » mais c’est Dior qui a décroché le jackpot…

Sauvage est adoré ou détesté, on pourrait presque le qualifier de clivant, si ce n’est qu’il n’est ainsi aimé ou haï que pour des raisons très techniques ayant fort peu de rapport avec l’esthétique : une tenue phénoménale et un sillage inévitable. Là plupart de ses opposants ne fronceraient point le sourcil s’il le sentait dans des proportions plus « normales. » ils se contenteraient probablement de le trouver banal au point de ne pas le remarquer.


Le succès de Sauvage est inversément proportionnel à sa créativité : dans ses différentes versions, Dior se contente de décliner une association de notes fraîches et épicées sur un fond de bois ambrés. Ce qui est surprenant, c’est de constater à quel point cela peut sembler premier degré, évocateur d’une parfumerie cheap et fonctionnelle, du déodorant Axe, citons-le. Peut-être ne comprenez-vous pas plus que moi ce qui peut bien plaire là-dedans… La version présentée, l’élixir, est un peu moins déplaisant dans son gigantisme outrancier, elle mise sur plus de densité et enveloppe les bois ambrés de nuances liquoreuses, réglissées, qui les rendent moins râpeux pour les fosses nasales des innocentes victimes de la maison Dior.

En lisant un commentaire, j’ai fini par capter l’effet madeleine de Proust : l’amateur disait y retrouver son déo d’adolescent. Ok, oui, je vois, je comprends. À moi aussi, Sauvage évoque les vestiaires de garçons après la gym, l’ado boutonneux qui tente de passer en mode bôgoss. Probablement que ça ne m’évoqua pas de trop bons souvenirs, ne suscite aucune nostalgie. Pour moi, cette époque, c’était une transition, j’aspirais à être enfin adulte (j’ai toujours été connecté à ma vieillesse intérieure, et je souhaitais laisser tout ça derrière moi. Et je n’ai vraiment aucun désir de m’y replonger. Mais je peux comprendre que certains s’attachent à ce parfum (même si en mon for intérieur, je juge terriblement.)

esquire korea, 02/2023

Vous remarquerez que j’ai illustré avec une campagne coréenne qui reprends les codes de l'international mais remplace Johnny Depp pat Lee Junho. Alors, vraiment, le retour de la virilité en parfum, j’ai du mal, mais associé à Johnny Depp, je n’y arrive pas. Outre que j’ai toujours suspecté un manque d’hygiène chez l’acteur, en 2023, l’ensemble fait vraiment trop délire masculiniste. Comme si finalement Sauvage puait la masculinité toxique ?

 

Sauvage Elixir, François Demachy pour Dior, 2021.

Commentaires

  1. Il pue tout court pour moi. Et vous ne croyez pas si bien dire en parlant du déodorant Axe. Il semblerait que le marketing de Paco Rabanne, pour ses créations (créations?) masculines s'est fortement inspiré de la structure des déodorants Axe, ce qui expliquerait leur succès phénoménal puisque la plupart des garçons de moins de 30 ans utilisent ces déodorants. Je peux le vérifier chaque fois que je vais à la salle de sport où les vestiaires sont transformés en Tchernobyl qui me fait tousser. Les fougères plus anciennes que vous citez avaient tout de même un côté moins écoeurant.

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    1. Je connaissais l'anecdote Même en boudant 1million, je lui trouve un petit quelque chose sous l'affreux flacon, mais Invictus comment dire? (à part NON et PAS MERCI) Les salles de sports sont un enfer (Alors qu'une larmichette d'aromatics elixir, c'est si beau, n'est-ce pas?)

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  2. Je n'ai jamais trouvé Azzaro macho... je le trouvais chaud sensuel enveloppant rassurant... Évidemment si vous évoquez la pub : pour les hommes qui aiment les femmes qui aiment les hommes, il ne faut surtout plus dire ça aujourd'hui où faut aimer tout le monde, les hommes les femmes les grenouilles... :)))
    Quant à ma période adolescente, je n'y reviendrai pas non plus ! Beurk c'était Narta ! Bonne semaine ! Gabrielle Dlr.

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  3. Un parfum lourd, un parfum de gros lourd. Écœurant au possible sans réelle recherche, un "cache-transpi" .
    ~Fabien~

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