"Elle est unie à l’été par un lien plus nécessaire : née des beaux jours, ne renaissant qu’avec eux, contenant un peu de leur essence, elle n’en réveille pas seulement l’image dans notre mémoire, elle en certifie le retour, la présence effective, ambiante, immédiatement accessible."
Marcel
Proust, à la recherche du temps perdu, du côté de chez Swann, 1913.
L’immortelle,
c’est cette fleur qui sent les épices. Pour certain sous sa forme d’hélichryse,
elle sera une odeur médicinale, pour d’autres, avec ses sous-tons sirupeux,
elle évoquera le tajine ou le curry. Mais c’est surtout un parfum paysage qui
en ramènera beaucoup sur les plages de leurs enfances, dans les dunes, là ou
elle pousse et parfume l’air, associée pour toujours au ciel très bleu, au
sable, à la mer toute proche. Ce n’est pas une note facile. Très présente,
indomptable et sombre, elle peut écœurer. La référence en la matière était le
Sables d’Annick Goutal, violent, ingérable, qui transportait immédiatement dans
son décor. C’était le premier soliflore du genre et il a fallu attendre
longtemps avant que le note se fasse plus présente en parfumerie. Parce qu’elle
est déroutante et difficile à gérer.
Marc-Antoine
Corticchiato a plusieurs fois abordé la note dans ses composition pour Parfum d’Empire,
mais elle s’imposait pour une collection héritage corse. C’est assez surprenant
et très habillement traité. Le départ surprend : très agrume, il a l’acidité
d’un citron très cologne à laquelle on ne s’attend pas pour un parfum à l’immortelle.
Ce scintillement laisse vite place à la fleur et à son grand ciel qui fait presque
mal aux yeux à force de bleu, l’ambiance de plage, de beau temps, de nature
sèche s’impose. C’est tout ce qu’on aime, c’est très réconfortant. C’est très
exotique à la ville et très ton sur ton au bord de la mer.
Mais le
plus séduisant, c’est d’avoir su transcender le parfum d’ambiance pour en faire
un parfum de peau en évitant la note de sirop un peu dérangeante. L’osmanthe
fait l’astuce en jouant de sa note abricotée qui se font joliment dans l’immortelle
et plus encore avec sa facette cuirée délicate qui fond le parfum sur la peau
et lui apporte l’humanité qu’il aurait pu ne pas avoir. C’est d’autant plus
plaisant que le registre reste sec et poudré. Je n’irais pas jusqu’à dire que c’est
élégant et sophistiqué, le travail est fort beau, fort bien fait, mais l’immortelle
n’a pas été trahie, elle garde son aspect sauvage, indomptable qui fait son
charme, elle reste, Dieu merci, un parfum qui se mérite, qu’il faut oser,
jouissif et réconfortant.
Immortelle
corse, Marc-Antoine Corticchiato pour Parfum d’Empire, 2019.
NB: flacon voyage offert, mais j'attends mon grand format que j'ai commandé.
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